Europe/ La Révolution par l'immigration
Le journaliste américain Christopher Caldwell enquête sur l’immigration islamique en Europe. Un chef d’œuvre. Et un signal d’alerte.
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Catégorie : Français
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PAR Michel Gurfinkiel.
Edmund Burke avait été, à la fin du XVIIIe siècle, l’un des chefs du parti libéral anglais, les whigs. A ce titre, il avait pris le parti des catholiques irlandais contre leurs maîtres protestants, celui des Insurgents, les rebelles américains, contre la Couronne, et enfin celui de l’Inde contre la colonisation. Mais le même Burke devint, après 1789, l’un des adversaires les plus résolus de la Révolution française, et surtout son premier adversaire intellectuel d’envergure, alors que les autres libéraux avaient tendance à l’approuver et à la soutenir. Dans une série d’essais publiés entre 1790 et 1792, sous le titre général de Réflexions sur la Révolution en France, il devait s’en expliquer. Le nouveau régime continental, notait-il, était libéral et démocratique en théorie, mais despotique en pratique ; tout en invoquant la liberté, il la supprimait ; sous couvert de philosophie et de raison, il donnait libre cours à des pulsions destructrices. Il constituait donc une fraude – ou une perversion. Si bien qu’en le combattant, les vrais libéraux ne trahissaient pas leurs convictions, mais au contraire les défendaient.
Christopher Caldwell, un journaliste américain de renom, grand reporter au Weekly Standard, mais aussi éditorialiste au New York Times et au Financial Times, est peut-être le Burke de ce XXIe siècle qui commence. Il s’est mis de lui-même dans la filiation du grand whig en intitulant Réflexions sur la Révolution en Europe un livre récemment publié chez Penguin. Mais c’est surtout par le fonds qu’il soutient la comparaison. Comme Burke, Caldwell décrit une Révolution que les libéraux et autres esprits généreux – la gauche, en termes d’aujourd’hui - se croient forcés de soutenir. Comme lui, il conclut à un piège dangereux. La principale différence, c’est que la crise française des années 1790 était de nature politique et sociale ; tandis que la crise européenne actuelle se situe dans les domaines démographique, culturel et religieux. Il ne s’agit plus, comme voici deux cents dix ans, d’abolir les ordres privilégiés ou la monarchie, mais d’accélérer la substitution d’une population à une autre dans toute l’Europe, et donc d’une civilisation par une autre.
On l’aura compris, Caldwell parle de l’immigration non-européenne et de ses conséquences. D’autres auteurs s’y sont essayés depuis une trentaine d’années. Rares sont ceux qui ont pu se faire entendre. La force de Caldwell, c’est d’avoir mené une enquête particulièrement complète, dans tous les pays européens. Et d’avoir évité tout ce qui pourrait, de près ou de loin, s’apparenter au racisme. Il ne dénonce pas, mais observe, avec minutie. Ses conclusions ont d’autant plus de poids.
Selon lui, les immigrants ont été plutôt bien traités depuis les années 1950, et leur condition n’a cessé de s’améliorer. Partout où ils ont souhaité s’intégrer au pays d’accueil, ils ont pu le faire. Et enfin, là où ils ne l’ont pas souhaité, l’Europe n’a pris aucune mesure de rétorsion, mais au contraire cherché à s’adapter elle-même à cette nouvelle présence. Une telle capitulation constitue, a priori, un « mystère ». En fait, elle ne fait que refléter le collapsus démographique du continent (« un quart de la population a plus de 60 ans ») et les valeurs pacifistes et ultra-démocratiques qui ont prévalu après la Seconde Guerre mondiale.
Ce qui donne à cette évolution un tour alarmant, c’est que la plupart des immigrants, aujourd’hui, sont originaires de pays musulmans, et que l’islam se pense et se conduit en civilisation universelle et conquérante. Le refus d’intégration n’est donc plus une exception, mais la règle. Et la tolérance européenne facilite l’entrée massive de populations décidées à remodeler l’Europe à leur image. « On peut affirmer avec certitude que l’Europe ne sortira pas indemne de sa confrontation avec l’islam », note Caldwell. « A l’heure actuelle, c’est à l’islam et non à la civilisation européenne ou ses valeurs démocratiques que les immigrants accordent une légitimité politique… Ils acceptent les institutions européennes dans la mesure où celles-ci ne freinent pas l’expansion de l’islam. Ils les rejettent quand elles deviennent un obstacle. »
Caldwell consacre plusieurs pages de son livre à l’avenir des Juifs européens. Sur ce sujet comme sur les autres, on ne peut qu’admirer sa lucidité. Il observe que pour beaucoup de musulmans, l’antisémitisme, y compris sous ses formes négationniste et néo-nazie, est « un moyen commode de participer à la culture européenne sans s’intégrer ». Il redoute aussi ce qu’il appelle « la tentation du bouc émissaire » : plutôt que de se mesurer à telle ou telle forme de violence islamique, de nombreux responsables européens affirment que celle-ci cessera, ou baissera en intensité, « quand le conflit israélo-palestinien sera résolu ». Ce qui revient à offrir aux Juifs un choix « horrible » : abandonner leurs frères israéliens ou être considérés comme les vrais responsables d’atrocités éventuelles commises sur le sol européen.
Un livre qui fera date. Mais à lire de suite.
Le journaliste américain Christopher Caldwell enquête sur l’immigration islamique en Europe. Un chef d’œuvre. Et un signal d’alerte.
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PAR Michel Gurfinkiel.
Edmund Burke avait été, à la fin du XVIIIe siècle, l’un des chefs du parti libéral anglais, les whigs. A ce titre, il avait pris le parti des catholiques irlandais contre leurs maîtres protestants, celui des Insurgents, les rebelles américains, contre la Couronne, et enfin celui de l’Inde contre la colonisation. Mais le même Burke devint, après 1789, l’un des adversaires les plus résolus de la Révolution française, et surtout son premier adversaire intellectuel d’envergure, alors que les autres libéraux avaient tendance à l’approuver et à la soutenir. Dans une série d’essais publiés entre 1790 et 1792, sous le titre général de Réflexions sur la Révolution en France, il devait s’en expliquer. Le nouveau régime continental, notait-il, était libéral et démocratique en théorie, mais despotique en pratique ; tout en invoquant la liberté, il la supprimait ; sous couvert de philosophie et de raison, il donnait libre cours à des pulsions destructrices. Il constituait donc une fraude – ou une perversion. Si bien qu’en le combattant, les vrais libéraux ne trahissaient pas leurs convictions, mais au contraire les défendaient.
Christopher Caldwell, un journaliste américain de renom, grand reporter au Weekly Standard, mais aussi éditorialiste au New York Times et au Financial Times, est peut-être le Burke de ce XXIe siècle qui commence. Il s’est mis de lui-même dans la filiation du grand whig en intitulant Réflexions sur la Révolution en Europe un livre récemment publié chez Penguin. Mais c’est surtout par le fonds qu’il soutient la comparaison. Comme Burke, Caldwell décrit une Révolution que les libéraux et autres esprits généreux – la gauche, en termes d’aujourd’hui - se croient forcés de soutenir. Comme lui, il conclut à un piège dangereux. La principale différence, c’est que la crise française des années 1790 était de nature politique et sociale ; tandis que la crise européenne actuelle se situe dans les domaines démographique, culturel et religieux. Il ne s’agit plus, comme voici deux cents dix ans, d’abolir les ordres privilégiés ou la monarchie, mais d’accélérer la substitution d’une population à une autre dans toute l’Europe, et donc d’une civilisation par une autre.
On l’aura compris, Caldwell parle de l’immigration non-européenne et de ses conséquences. D’autres auteurs s’y sont essayés depuis une trentaine d’années. Rares sont ceux qui ont pu se faire entendre. La force de Caldwell, c’est d’avoir mené une enquête particulièrement complète, dans tous les pays européens. Et d’avoir évité tout ce qui pourrait, de près ou de loin, s’apparenter au racisme. Il ne dénonce pas, mais observe, avec minutie. Ses conclusions ont d’autant plus de poids.
Selon lui, les immigrants ont été plutôt bien traités depuis les années 1950, et leur condition n’a cessé de s’améliorer. Partout où ils ont souhaité s’intégrer au pays d’accueil, ils ont pu le faire. Et enfin, là où ils ne l’ont pas souhaité, l’Europe n’a pris aucune mesure de rétorsion, mais au contraire cherché à s’adapter elle-même à cette nouvelle présence. Une telle capitulation constitue, a priori, un « mystère ». En fait, elle ne fait que refléter le collapsus démographique du continent (« un quart de la population a plus de 60 ans ») et les valeurs pacifistes et ultra-démocratiques qui ont prévalu après la Seconde Guerre mondiale.
Ce qui donne à cette évolution un tour alarmant, c’est que la plupart des immigrants, aujourd’hui, sont originaires de pays musulmans, et que l’islam se pense et se conduit en civilisation universelle et conquérante. Le refus d’intégration n’est donc plus une exception, mais la règle. Et la tolérance européenne facilite l’entrée massive de populations décidées à remodeler l’Europe à leur image. « On peut affirmer avec certitude que l’Europe ne sortira pas indemne de sa confrontation avec l’islam », note Caldwell. « A l’heure actuelle, c’est à l’islam et non à la civilisation européenne ou ses valeurs démocratiques que les immigrants accordent une légitimité politique… Ils acceptent les institutions européennes dans la mesure où celles-ci ne freinent pas l’expansion de l’islam. Ils les rejettent quand elles deviennent un obstacle. »
Caldwell consacre plusieurs pages de son livre à l’avenir des Juifs européens. Sur ce sujet comme sur les autres, on ne peut qu’admirer sa lucidité. Il observe que pour beaucoup de musulmans, l’antisémitisme, y compris sous ses formes négationniste et néo-nazie, est « un moyen commode de participer à la culture européenne sans s’intégrer ». Il redoute aussi ce qu’il appelle « la tentation du bouc émissaire » : plutôt que de se mesurer à telle ou telle forme de violence islamique, de nombreux responsables européens affirment que celle-ci cessera, ou baissera en intensité, « quand le conflit israélo-palestinien sera résolu ». Ce qui revient à offrir aux Juifs un choix « horrible » : abandonner leurs frères israéliens ou être considérés comme les vrais responsables d’atrocités éventuelles commises sur le sol européen.
Un livre qui fera date. Mais à lire de suite.
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