Saturday, April 08, 2006

CALOTTES ET KIPPOT ENSEMBLE A MANHATTAN

Calotte et kippa ensemble à Manhattan
De notre envoyée spaciale à New York
06 avril 2006, (Rubrique Reportages)
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Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.

Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.

Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.

Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.

Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.

Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.

Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.

Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.


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Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.
-->Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.


Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.

Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.

Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.

Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.

Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.

Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.

Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.

Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.


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Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.
-->Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.

Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.

Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.

Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.

Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.

Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.

Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.

Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.

Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.


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Selon les sages, «lorsqu'ils disputent un sujet, ils se font l'ennemi l'un de l'autre ; or une fois la dispute terminée, ils deviennent amants les uns des autres». Dans la beit midrash, la salle d'études, une curieuse union a été scellée la semaine dernière autour du Talmud : celle du col romain et de la kippa. Accueillis par David Weiss dans son école rabbinique de Manhattan, sur le territoire de l'université Columbia, trois cardinaux, une quinzaine d'évêques et quelques prêtres se sont assis pour une étude talmudique en commun avec de jeunes étudiants dont certains possèdent déjà leurs diplômes d'avocat, de médecin, de chercheur ou d'enseignant.
-->Face au cardinal Jean-Marie Lustiger, Nathaniel ne semble pas du tout démonté. A peine a-t-il les joues qui chauffent en lui exposant les différentes interprétations sur les trois prières quotidiennes. Quelques tables et des dizaines de piles de livres plus loin, Mgr Robert Le Gall, évêque de Mende, fait face à Ionah pour cette inhabituelle «chevrouta» judéo-catholique. L'ancien abbé bénédictin qui, depuis la stalle séculaire de son monastère, chantait les psaumes en latin sur des textes hébreux, transmet quelques parcelles de son savoir au réserviste de Tsahal – l'armée d'Israël –, qui, de son côté, étudie et commente les écrits d'un vénérable rabbin.
Derrière eux, comme dans une volière, d'autres évêques et d'autres futurs rabbins argumentent en anglais, en français ou en espagnol. Le temps est suspendu durant cette heure historique du début du printemps. Dehors, le soleil réchauffe timidement les rues de New York. Sur le rebord de la fenêtre, un petit drapeau américain voisine avec celui de l'Etat d'Israël.
C'est le troisième voyage officiel d'étude des évêques français au coeur de l'orthodoxie juive américaine. Mais jamais ils n'auraient imaginé être invités un jour à participer à ces duels intellectuels qui relèvent de la pratique religieuse la plus sacrée. C'est d'ailleurs une première pour le cardinal Lustiger, venu du judaïsme. Il l'évoque de sa voix rauque, comme si de rien n'était, comme pour ne pas lui donner trop d'importance.
Israël Singer, président du Congrès juif mondial, est allé le chercher à Paris, au début des années 2000, après la visite de Jean-Paul II à Jérusalem. Un pas supplémentaire avait été franchi en direction du monde juif avec la prière au Mur des lamentations et la visite au mémorial Yad Vashem. Les temps étaient mûrs pour aller plus loin. Celui qui était alors archevêque de Paris a tout de suite saisi l'opportunité et les enjeux possibles des échanges avec l'orthodoxie juive moderne, «véritable réservoir d'identité».
Pragmatique sur les conditions de réalisation mais convaincu que «la rencontre de chrétiens vaguement chrétiens avec des juifs vaguement juifs ne pourra pas être à la source de grandes convictions», il a invité quelques prêtres de son diocèse, puis quelques évêques, à la découverte de cette orthodoxie américaine, dont une partie est unique au monde par son ouverture.
Les étudiants de la yeshiva «Kraft center», particulièrement disposés au dialogue, ont conscience de vivre un moment insolite. Dans les couloirs, tous, en majorité non barbus, tsitsit (franges de laine) peu visible à la taille, observent avec curiosité et une certaine bonhomie deux des cardinaux qui portent leur longue soutane noire ceinturée de soie rouge. Le rabbin Weiss, dont l'institut a été choisi cette année par Israël Singer, est visiblement satisfait. Il présente les uns aux autres avec des gestes ronds et des phrases chaleureuses. Dans un grand silence, il dit «rappeler l'âme d'Ilan Halimi et tendre la main aux évêques français pour affronter le mal de l'antisémitisme».
En aparté et en son nom propre, alors que chacun vaque à sa rencontre, David Weiss évoque aussi le prochain voyage de Benoît XVI en Pologne et sa visite programmée à Auschwitz entre les 25 et 28 mai. «Le geste sera véritablement fort et courageux, dit-il, si Benoît XVI se saisit de l'occasion pour faire déplacer l'église catholique située dans l'ancienne kommandantur SS de Birkenau, comme Jean-Paul II a résolu le dossier du carmel d'Auschwitz !» Avec un grand sourire, il explique que les amis sont ainsi : «S'ils veulent s'apprécier, ils doivent pouvoir se dire ce qui va ou ne va pas.»
En attendant, dans la salle d'étude, c'est l'entente cordiale. La rencontre se termine par le chant du psaume 122, évoquant la paix sur Israël. David Weiss, Israël Singer et le cardinal Lustiger tendent les mains à leurs voisins, une vaste chaîne est constituée, le ton monte, la chaleur aussi. Une danse est ébauchée, l'émotion perceptible, les bras se posent sur les épaules. Chacun prend le rythme. Tout le monde espère que rien ne sera plus comme avant.
Pour en arriver là, il aura fallu compter sur le travail invisible du secrétaire du comité épiscopal pour les relations avec le judaïsme, le père Patrick Desbois. Invoquant sans cesse la Providence, il veille au moindre détail pendant ces quarante-huit heures de rencontre. Impressionné par sa personnalité, le quotidien israélien Haaretz vient de consacrer six pages aux travaux discrets que cet acharné mène depuis quelques années en Ukraine, à la recherche des fosses communes juives abandonnées.
Pour sa part, toujours aussi bouillonnant, depuis un petit snack casher où se sont posés juifs et catholiques, dans le quartier ultraorthodoxe de Crown Eights, Israël Singer dit vouloir aller plus loin encore, vers un véritable trilogue judéo-christiano-musulman. «Dans un pays arabe», espère-t-il, soulignant qu'il vient d'en parler avec le Pape et ses collaborateurs au Vatican.

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