UN MEA CULPA STRATEGIQUE DE GOLLNISCH
Procès Gollnisch à Lyon : un mea-culpa bien stratégique
Le parquet n'a requis que 10 000 euros d'amende contre le numéro 2 du FN.
Par Olivier BERTRAND
QUOTIDIEN : jeudi 9 novembre 2006
Lyon de notre correspondant
Pour commencer sa journée, Bruno Gollnisch a réaffirmé, hier, devant le tribunal correctionnel de Lyon, sa «pleine et entière» reconnaissance de la Shoah et de l'utilisation des chambres à gaz dans les camps d'extermination nazis. Une militante de l'Union des étudiants juifs de France (UEJF) pestait, qualifiant d' «opportuniste» cette déclaration, faite selon elle pour amadouer les juges. Pourtant, son syndicat, comme la Licra, s'est désisté mardi, en échange de cette reconnaissance publique ( Libération d'hier). Le procès a cependant continué, Gollnisch restant poursuivi pour contestation de l'existence de crimes contre l'humanité. Le tribunal voulait préciser les propos tenus par le numéro 2 du FN, le 11 octobre 2004, lors d'une conférence de presse.
«Neutralité». Selon la plupart des journalistes présents ce jour-là, le député européen avait évoqué le rapport rendu par l'historien Henry Rousso sur le négationnisme à l'université Lyon-III. Il se réjouissait d'un travail minimisant les différentes affaires, mais n'avait pu s'empêcher de glisser, selon l'un des journalistes : «M. Rousso est un historien engagé, une personnalité juive, certes estimable, mais sa neutralité n'était pas garantie.» Cinq autres journalistes ont confirmé en substance l'expression. Le leader FN a répondu qu'il faisait référence au fait qu' «un universitaire enquête sur l'université».
Interrogé lors de la même conférence de presse sur le négationnisme et les chambres à gaz, Gollnisch avait demandé, selon la plupart des journalistes, que la question puisse être discutée librement, tout comme le nombre de morts dans les camps nazis. A l'audience, hier, il a contesté ce dernier point, tout en admettant avoir évoqué les «intérêts de l'Etat d'Israël», qui empêcheraient, selon lui, d'évoquer librement le nombre de morts.
L'audience a traqué les écarts d'un papier à l'autre. Mais, à quelques contradictions près, la plupart des journalistes semblaient avoir entendu la même chose. Seul l'un d'entre eux affirmait n'avoir pas entendu les mêmes phrases sur les chambres à gaz, ni sur le nombre de morts et les «intérêts d'Israël». Trois journalistes ont affirmé que leur confrère était arrivé en retard, à la fin de la conférence de presse. Pourtant, une semaine plus tard, il avait publié un long texte présenté comme le «verbatim» de la conférence de presse, qui reprenait la version de Gollnisch. Un compte rendu si précis que Fernand Schir, président de la chambre spécialisée dans les affaires de presse, s'est étonné de la reprise intégrale d'une locution latine complexe. Le journaliste a reconnu s'être inspiré, pour «préciser» son «verbatim», de documents remis par le FN.
Dérapages. Restait à établir si les propos tenus relèvent du négationnisme. Bruno Gollnisch avait entouré ses réponses de phrases telles que : «Personnellement, je ne conteste pas l'existence des chambres à gaz homicides.» Gérard Boulanger, avocat de SOS Racisme, a remis en perspective les propos ambigus tenus par des leaders FN, en fonction de stratégies internes à l'extrême droite. Il a rappelé comment les formules en lisière de légalité ouvrent la brèche aux dérapages des plus durs.
Le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESR), saisi le 26 avril 2005 par Bruno Gollnisch qui venait de se voir infliger une interdiction d'enseigner de cinq ans, a donné son avis : «En tenant ces propos ambigus, M. Bruno Gollnisch ne pouvait pas ignorer le doute qu'ils étaient susceptibles de semer quant à l'existence des chambres à gaz et à l'importance de l'extermination des Juifs et des autres catégories stigmatisées pendant la Seconde Guerre mondiale, pas plus qu'il ne pouvait ignorer, en tant qu'universitaire, la contribution éventuelle de ses propos aux thèses négationnistes.» Le numéro 2 du FN a balayé ces conclusions avec colère, qualifiant le CNESR de «cénacle de syndicalistes d'extrême gauche». Le parquet de Lyon, peu réputé pour ses penchants gauchistes, a estimé pour sa part que Bruno Gollnisch par ses «insinuations», a «franchi la ligne jaune», «commis la faute et dérapé». Mais le procureur adjoint, Bernard Reynaud, prenant en compte des propos qu'il avait tenus la veille sur la Shoah n'a requis que 10 000 euros d'amende.
Le parquet n'a requis que 10 000 euros d'amende contre le numéro 2 du FN.
Par Olivier BERTRAND
QUOTIDIEN : jeudi 9 novembre 2006
Lyon de notre correspondant
Pour commencer sa journée, Bruno Gollnisch a réaffirmé, hier, devant le tribunal correctionnel de Lyon, sa «pleine et entière» reconnaissance de la Shoah et de l'utilisation des chambres à gaz dans les camps d'extermination nazis. Une militante de l'Union des étudiants juifs de France (UEJF) pestait, qualifiant d' «opportuniste» cette déclaration, faite selon elle pour amadouer les juges. Pourtant, son syndicat, comme la Licra, s'est désisté mardi, en échange de cette reconnaissance publique ( Libération d'hier). Le procès a cependant continué, Gollnisch restant poursuivi pour contestation de l'existence de crimes contre l'humanité. Le tribunal voulait préciser les propos tenus par le numéro 2 du FN, le 11 octobre 2004, lors d'une conférence de presse.
«Neutralité». Selon la plupart des journalistes présents ce jour-là, le député européen avait évoqué le rapport rendu par l'historien Henry Rousso sur le négationnisme à l'université Lyon-III. Il se réjouissait d'un travail minimisant les différentes affaires, mais n'avait pu s'empêcher de glisser, selon l'un des journalistes : «M. Rousso est un historien engagé, une personnalité juive, certes estimable, mais sa neutralité n'était pas garantie.» Cinq autres journalistes ont confirmé en substance l'expression. Le leader FN a répondu qu'il faisait référence au fait qu' «un universitaire enquête sur l'université».
Interrogé lors de la même conférence de presse sur le négationnisme et les chambres à gaz, Gollnisch avait demandé, selon la plupart des journalistes, que la question puisse être discutée librement, tout comme le nombre de morts dans les camps nazis. A l'audience, hier, il a contesté ce dernier point, tout en admettant avoir évoqué les «intérêts de l'Etat d'Israël», qui empêcheraient, selon lui, d'évoquer librement le nombre de morts.
L'audience a traqué les écarts d'un papier à l'autre. Mais, à quelques contradictions près, la plupart des journalistes semblaient avoir entendu la même chose. Seul l'un d'entre eux affirmait n'avoir pas entendu les mêmes phrases sur les chambres à gaz, ni sur le nombre de morts et les «intérêts d'Israël». Trois journalistes ont affirmé que leur confrère était arrivé en retard, à la fin de la conférence de presse. Pourtant, une semaine plus tard, il avait publié un long texte présenté comme le «verbatim» de la conférence de presse, qui reprenait la version de Gollnisch. Un compte rendu si précis que Fernand Schir, président de la chambre spécialisée dans les affaires de presse, s'est étonné de la reprise intégrale d'une locution latine complexe. Le journaliste a reconnu s'être inspiré, pour «préciser» son «verbatim», de documents remis par le FN.
Dérapages. Restait à établir si les propos tenus relèvent du négationnisme. Bruno Gollnisch avait entouré ses réponses de phrases telles que : «Personnellement, je ne conteste pas l'existence des chambres à gaz homicides.» Gérard Boulanger, avocat de SOS Racisme, a remis en perspective les propos ambigus tenus par des leaders FN, en fonction de stratégies internes à l'extrême droite. Il a rappelé comment les formules en lisière de légalité ouvrent la brèche aux dérapages des plus durs.
Le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESR), saisi le 26 avril 2005 par Bruno Gollnisch qui venait de se voir infliger une interdiction d'enseigner de cinq ans, a donné son avis : «En tenant ces propos ambigus, M. Bruno Gollnisch ne pouvait pas ignorer le doute qu'ils étaient susceptibles de semer quant à l'existence des chambres à gaz et à l'importance de l'extermination des Juifs et des autres catégories stigmatisées pendant la Seconde Guerre mondiale, pas plus qu'il ne pouvait ignorer, en tant qu'universitaire, la contribution éventuelle de ses propos aux thèses négationnistes.» Le numéro 2 du FN a balayé ces conclusions avec colère, qualifiant le CNESR de «cénacle de syndicalistes d'extrême gauche». Le parquet de Lyon, peu réputé pour ses penchants gauchistes, a estimé pour sa part que Bruno Gollnisch par ses «insinuations», a «franchi la ligne jaune», «commis la faute et dérapé». Mais le procureur adjoint, Bernard Reynaud, prenant en compte des propos qu'il avait tenus la veille sur la Shoah n'a requis que 10 000 euros d'amende.
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