Monday, January 19, 2009

L'éditorial de Claude Imbert - L'horreur, et après ?
Claude Imbert

Imprimez Réagissez Classez Depuis soixante ans, ce conflit empoisonne le monde. Sur les collines inspirées par les messies du Dieu unique, un escadron de sorcières attise contre Israël, pieu d'Occident fiché en terre arabe, la colère d'un autre peuple errant. Le fanatisme religieux couronnant des haines rabiques, le brasier expédie ses brandons dans l'immense communauté islamique. Voici donc l'aspic redoutable que le nouveau César américain trouvera dans les plis de sa toge présidentielle ! Voici la hantise croissante chez une Europe vulnérable aux poisons de ce proche, trop proche Orient !

Dans cet enragement on voit s'enrouler sans fin la spirale du pire. Mais dans les souterrains de la crise quelques pistes fragiles cherchent le bout du tunnel.

Le pire se profile avec la radicalisation de la guerre livrée à Israël. Souvenez-vous que l'Autorité palestinienne-celle jadis d'Arafat et qui donna l'espérance fallacieuse d'un pouvoir apte à négocier-s'est trouvée débordée, dévaluée puis combattue par la dissidence de ses jusqu'au-boutistes. Contre elle, le Hamas, qui veut la mort d'Israël, prend le contrôle de la bande de Gaza. Au Liban, le Hezbollah chiite surarmé se rengorge d'avoir résisté en 2006 à l'expédition punitive d'Israël. Enfin, le président iranien Ahmadinejad jette de l'huile sur le feu en appelant, lui aussi, à la fin de l'Etat juif.

Partout, le fanatisme religieux devient le fer de lance des forcenés. Les fous de Dieu furent un temps soutenus sous cape par Israël, d'ordinaire mieux inspiré, contre l'Autorité palestinienne plus volontiers laïque. Mais l'excitation religieuse a conforté la lutte des enragés qui désormais mènent un train d'enfer. C'est gratifiés par le Prophète d'une torche divine qu'ils éclairent leur combat, recrutent leurs kamikazes et tentent de rameuter, au large, la solidarité islamique. Est-elle inscrite, comme ils le prônent, dans les préceptes du Coran ? Est-ce une solidarité de crise et nullement inéluctable ? Allez savoir !

La rue, de Nouakchott à Islamabad, n'en a cure qui frémit chaque jour de voir des enfants palestiniens pantelants ou morts sur des civières. Le Hamas sait que le front médiatique ne nourrit que trop bien l'écoeurement des masses. La « disproportion » spectaculaire de la riposte israélienne fera son jeu. Disproportion fatale, celle des guerres du faible au fort, dès lors qu'un Etat s'avise, avec son armée, de punir des clandestins qui lui expédient à l'aveuglette une pluie de roquettes. Quelles que soient les prétentions au « ciblage » de Tsahal, les dégâts épargnent d'autant moins les civils que les combattants du Hamas ont pour pratique avérée de cacher leurs batteries au beau milieu d'une population grouillante en zone exiguë, dans des sous-sols d'immeubles, voire d'écoles.

Une vaste répulsion pacifiste répond, dans la rue, aux voeux du Hamas. Portée, amplifiée par Al-Jazira, Internet et le bouche-à-oreille, l'horreur des « massacres » remue comme jamais, du Maghreb à l'Indonésie, l'immense communauté islamique. En France, les quartiers sensibles bougent. Des juifs cachent leur kippa et certains, déjà, déménagent. Une foule de plus de cent mille personnes s'exaltait, à Paris, l'autre jour, contre Israël. Dans l'ultragauche, mais aussi dans tous les cafés arabes et sur les graffitis des murs, l'antisionisme se mue en antisémitisme déclaré. Une très sale pente !

Ecrasée par ce pandémonium, l'espérance se cache sous le tapis vert des Etats. Car le Hamas, s'il enflamme la rue, fait peur aux caciques. Peur aux Palestiniens de Cisjordanie, où le Fatah lui fait une guerre déclarée. Peur à l'Egypte, qui redoute la contagion chez ses propres Frères musulmans. Peur à l'Arabie saoudite, aux Emirats, qui voient, derrière l'Iran, l'axe chiite-du Hezbollah libanais jusqu'à l'Irak-se déployer sur leur aire. Peur aux potentats qui redoutent que l'excitation populaire n'emporte leur régime réputé corrompu par l'Occident ! Peur d'un déferlement islamiste qui redessinerait, par la guerre, toute la région. Peur à l'Occident pour ses effets incommensurables : économique, politique et humanitaire par la dérive du conflit vers une guerre de religion et le regain du terrorisme...

Des optimistes relèvent que le Hezbollah manipulé par Téhéran n'a encore rien entrepris, ce coup-ci, sur son propre front contre Israël. L'Iran arme donc le Hamas, mais ne veut pas d'avance insulter l'avenir. Et l'avenir proche, c'est ici les élections israéliennes et l'élection présidentielle d'un Iran qui hésite toujours, juché sur son projet nucléaire, entre ses radicaux et ses modérés. L'avenir, c'est enfin et surtout Obama, et l'hypothèse d'une négociation globale entre les Etats-Unis et le pouvoir perse. L'avenir, c'est peut-être, sous le fracas des va-t-en-guerre, une espérance encore cachée. Une mélodie en sous-sol.

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