Friday, June 16, 2006

LA COUR DE CASSATION CELEBRE LE CENTENAIRE DE L'AFFAIRE DREYFUS

La Cour de cassation célèbre le centenaire de la réhabilitation du capitaine Dreyfus --par Verena von Derschau-- AP 16.06.06 15:42PARIS (AP) -- La Cour de cassation va commémorer lundi, avec quelques jours d'avance, le centenaire de la réhabilitation judiciaire du capitaine Alfred Dreyfus, le 12 juillet 1906, qui avait mis fin à "un crime judiciaire" et une affaire qui a profondément marqué les esprits de l'époque et l'histoire de France. Un colloque intitulé "de la justice dans l'affaire Dreyfus" doit se tenir toute la journée dans la Grande chambre de la Cour, celle-là même où fut prononcé le célèbre arrêt de réhabilitation près de cent ans plus tôt. Il doit réunir les plus hauts magistrats de la Cour, comme son président Guy Canivet, mais aussi l'académicien Jean-Denis Bredin, le président de la Société internationale d'histoire de l'affaire Dreyfus, Marcel Thomas ou les professeurs Alain Pagès et Jean-Pierre Royer. La journée "a pour ambition de montrer ce que représente l'affaire Dreyfus pour la Cour de cassation et la justice toute entière", a expliqué M. Canivet lors de la conférence de presse de présentation. "Qu'on ne s'y trompe pas! Les deux grands actes de révision de la Cour de cassation durant l'affaire Dreyfus représentèrent un véritable combat pour faire entendre justice", a souligné l'actuel président de la Cour. Il rend hommage à ses prédécesseurs qui "au péril de leur réputation et de leur tranquillité, ont osé, ont eu le courage de défier la violence d'Etat et les haines raciales pour faire entendre la justice". "Dans l'affaire Dreyfus, la Cour de cassation a rempli son rôle. En l'accomplissant, elle a écarté la République de la dictature et renforcé la démocratie". Ce que rappelle Guy Canivet, c'est que la réhabilitation du capitaine Dreyfus -deux fois condamné par la justice militaire et gracié par le président Emile Loubet au lendemain de la seconde-n'allait pas de soi à l'époque. Les antidreyfusards étaient encore nombreux dans la société française et dans la presse et le gouvernement de l'époque ne tenait pas particulièrement à une seconde révision qui allait relancer cette sombre affaire, montée de toutes pièces par l'armée. C'est le 15 octobre 1994 que l'affaire a débuté. Le capitaine Alfred Dreyfus, convoqué au ministère de la guerre, est arrêté et accusé de "haute trahison". Il est soupçonné, sur la base d'analyses qui vont s'avérer fausses, d'être l'auteur d'un bordereau adressé à Alexander von Schwartzkoppen, l'attaché militaire allemand en poste à Paris. Malgré ses dénégations, Alfred Dreyfus est condamné le 22 décembre par les juges du Conseil de guerre à la déportation à vie dans une enceinte fortifiée et déporté à l'île au Diable en Guyane. "Français, je suis innocent", criera le condamné lorsqu'on lui arrache ses épaulettes le 5 janvier 1895, dans la cour des Invalides. S'engage alors un violent combat pour la révision du procès mené par la famille Dreyfus. La presse se déchaîne, l'opinion publique se divise, le tout sur fond d'un profond antisémitisme. Et alors que l'armée découvre le véritable auteur du bordereau, le commandant Ferdinand Esterhazy, qui sera acquitté quelques années plus tard. En 1898, le garde des Sceaux saisit finalement la Cour de cassation d'une demande de révision du procès. Le 3 juin 1899, la Cour de cassation casse la condamnation du capitaine. Qui sera cependant recondamné le 9 septembre à dix ans de détention. Et gracié quelques jours plus tard. Il faudra ensuite attendre 1903 pour que la Cour de cassation soit saisie d'une nouvelle demande de révision. Et l'arrêt de 1906 pour déclarer Dreyfus définitivement innocent. Le lendemain, il est réintégré dans l'armée. Le 21 juillet, il sera décoré de la Légion d'honneur. En 1908, un journaliste nationaliste tire sur lui et le blesse au bras, le jour du transfert des cendres de l'écrivain Emile Zola, l'un de ses plus ardents défenseurs, au Panthéon. Mis à la retraite de l'armée à se demande en 1907, il mourra le 11 juillet 1935. A l'occasion du centenaire de sa réhabilitation, la Cour de cassation publie également un ouvrage "De la justice dans l'affaire Dreyfus" (Fayard, 419 pages, 26 euros) qui démonte le complot de l'armée contre un officier juif qui a payé pour un crime commis par un autre officier. A l'occasion de l'inauguration de l'exposition sur le capitaine Dreyfus au musée d'Art et d'Histoire du Judaïsme, à Paris, mardi, le garde des Sceaux, Pascal Clément, a fait sienne l'expression de Jean-Denis Bredin qui a qualifié l'affaire Dreyfus non pas "d'erreur judiciaire", mais de "crime judiciaire". AP

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