La communauté juive entre aussi en campagne électorale
S. de R.
14/02/2008 | Mise à jour : 07:07 | Commentaires 6 .
Gilles Bernheim est candidat au poste de grand rabbin de France contre Joseph Sitruk.
La communauté juive se prépare elle aussi à des élections. Celles-ci auront lieu les 22 et 24 juin prochain. Elles concernent le grand rabbinat de France, le Consistoire central et le Consistoire de Paris.
Grand rabbin des quelques 800 000 juifs de France depuis 21 ans, Joseph Sitruk, 63 ans, brigue un quatrième mandat de 7 ans. Il l'a justifié à l'hebdomadaire Actualité juive, estimant qu'il pouvait «encore apporter beaucoup à la communauté» et qu'il avait « une dette morale» à l'égard des fidèles. Un accident vasculaire l'a empêché d'exercer sa fonction au début des années 2000.
Face à lui, un seul candidat pour le moment : Gilles Bernheim, né en 1952, grand rabbin de la synagogue de la Victoire à Paris. Cet intellectuel reconnu responsable du département Torah et société au Consistoire de Paris , s'était déjà présenté en 1994. Au terme d'une campagne «très rude», il n'était pas parvenu à se faire élire par les 300 représentants des consistoires régionaux.
«Joseph Sitruk, reconnaît-il, a imprimé sa marque sur le judaïsme français et le désir de judaïté dans nombres de foyers, avec ses formes propre de charisme et d'intelligence.» « Mais une institution qui ne se renouvelle pas est appelée à mourir», prévient-il avant d'ajouter que «le renouveau de l'ensemble des cadres» permet d'éviter «toute forme de carriérisme, de clientélisme et de clanisme ». Il redoute que les enjeux, comme en 1994, quittent le terrain français pour s'enliser dans la complexité des courants rabbiniques en Israël.
Concernant le lien entre les deux états, point névralgique de la vie juive, Gilles Bernheim analyse qu'ils sont pour lui «comme un père et une mère», sans pouvoir attribuer les rôles.
«Ouverture et dialogue»
«J'ai des parents qui s'entendent bien et cela m'aide à vivre», ajoute-t-il s'inquiétant du nombre «croissant» de «cadres» tentés de «monter» vers Israël pour des raisons religieuses ou d'antisémitisme. Il refuse cependant de «comparer la situation des années 1930 à celle d'aujourd'hui». Le grand rabbin prône « l'ouverture et le dialogue » sans craindre pour autant de défendre «un judaïsme rigoureusement orthodoxe».
S'il est élu, le duo national sera renouvelé puisque Jean Kahn, 78 ans, grande figure du judaïsme français et président du Consistoire depuis 1995, ne se représente pas. Un seul candidat s'est déclaré pour l'instant : le vice-président du Consistoire et président à Marseille, Zvi Ammar. Président du Consistoire de Paris, Joël Mergui qui inaugure dimanche le nouveau centre pour étudiants Edmond-Fleg , hésite encore à se lancer.
Dernière élection, celle du grand rabbinat de Paris. De jeunes rabbins aussi «modernes» qu'attachés aux traditions pourraient se retrouver face à David Messas, 72 ans, qui brigue un troisième mandat sur les traces de son père, grand rabbin de Jérusalem à 97 ans. Outre un rabbin de Levallois de 37 ans, Mikaël Journo, 34 ans, brûle de se présenter. Bras droit du rabbin Messas, il est aussi à la tête d'un collectif d'initiatives rabbiniques. «Nous voulons montrer, dit-il, qu'il existe des juifs heureux en France, que les voitures de police devant les synagogues ou les écoles ne nous coupent pas de la société.»
Par Jean-Yves Camus (Chercheur en science politique) 11H51 12/02/2008
Non, le "nouvel antisémitisme" n'a pas totalement remplacé l'ancien, celui de l'extrême droite. Celui-ci existe bel et bien, y compris dans la police. Les trois policiers en poste à Amiens, mis en examen pour avoir, dans la nuit du 1er au 2 février, alors qu'ils se trouvaient après leur service dans un bar de la ville, tenu des propos antisémites, en sont la preuve. Et leur dérapage pose la question de savoir pourquoi un d’entre eux au moins, connu pour son engagement public au Front national, n’a visiblement jamais attiré l’attention de sa hiérarchie, après avoir été muté, de Paris vers la Somme.
Un ex-candidat du Front national
Le brigadier-chef Christophe Lengelé, 39 ans, était en effet, en 2002, candidat suppléant aux législatives sous l’étiquette du Front national dans sixième circonscription de la Somme. Sa sœur portait les couleurs du parti dans le Rhône. Son épouse est actuellement conseillère régionale FN de Picardie. Il serait également membre de la FPIP (Fédération professionnelle indépendante de la police), un petit syndicat très marqué à droite de la droite. Et son militantisme était déjà connu à Paris, quand il y était en poste.
A Amiens même, il ne faisait pas mystère de ses idées, puisqu’il était encore candidat aux élections au comité central du FN, en novembre 2007. Ce qui relativise la portée de la réaction de Michel Guiniot, le président du groupe FN au conseil régional de Picardie, qui s’était déclaré "abasourdi" par l’affaire et avait rappelé sa réputation "d’avoir systématiquement fait le ménage dans ma fédération (…)", ajoutant: "Chaque fois que je détecte un skinhead, il est écarté."
Or, parmi les propos qui sont reprochés au trio, figure une référence explicite au "white power", idéologie raciste primaire prônant la suprématie de la race blanche, et particulièrement propagée par les milieux skinhead.
Les exceptions d'une police majoritairement républicaine
Très majoritairement républicaine, la police nationale n’en est pourtant pas à la première affaire mettant en cause des militants de la droite la plus extrême. La dernière "grosse affaire" remonte cependant à la fin des années 80, lorsque des militants néo-nazis du Parti nationaliste français et européen (PNFE) participent, en 1988, à une série d’attentats contre des foyers Sonacotra dans le sud de la France. Atypiques dans leur origine, ces actions n’en sont pas moins meurtrières: commises à Cannes en mai 1988 et à Cagnes-sur-Mer en décembre de la même année contre des foyers de la Côte d’Azur, elles ont fait un mort et des blessés.
Se croyant malins, et voulant envenimer les relations entre juifs et musulmans, ils avaient revendiqué l’action au nom d’une organisation juive. Très vite pourtant, l’enquête s’était orientée vers le PNFE, dont l’encadrement s’avéra être largement composé de policiers. Furent ainsi appréhendés quatre policiers, membres de la FPIP, dont le procès eut lieu en 1991et qui furent révoqués de la police.
Un phénomène plus répandu chez les militaires
L’un d’eux, Serge Lecanu, était carrément le secrétaire général de la FPIP, qui a depuis évolué vers des eaux plus calmes, bien que toujours proches de la droite la plus dure. Un autre, Philippe Caplain, devint responsable départemental du département Protection Sécurité, le service d’ordre du FN, dans les Hauts-de-Seine.
De pareilles affaires, la commission d’enquête parlementaire sur le DPS, en avait soulevé plusieurs lors de ses travaux, en 1999: un gardien de la paix, cadre d’un groupe néo-nazi alsacien dissous par le conseil des ministres en 1993, responsable DPS pour le "Grand Est", avait été révoqué de la police en 1994 ; un brigadier de police en poste à Clermont-Ferrand, était responsable départemental DPS du Puy-de-Dôme, tandis qu’un ancien sous-brigadier occupait la même fonction dans l’Isère. Des cas individuels qui ne sont pas anodins, mais qui ne doivent pas masquer le fait que la commission d’enquête avait épinglé davantage encore d’anciens militaires que de policiers.
S. de R.
14/02/2008 | Mise à jour : 07:07 | Commentaires 6 .
Gilles Bernheim est candidat au poste de grand rabbin de France contre Joseph Sitruk.
La communauté juive se prépare elle aussi à des élections. Celles-ci auront lieu les 22 et 24 juin prochain. Elles concernent le grand rabbinat de France, le Consistoire central et le Consistoire de Paris.
Grand rabbin des quelques 800 000 juifs de France depuis 21 ans, Joseph Sitruk, 63 ans, brigue un quatrième mandat de 7 ans. Il l'a justifié à l'hebdomadaire Actualité juive, estimant qu'il pouvait «encore apporter beaucoup à la communauté» et qu'il avait « une dette morale» à l'égard des fidèles. Un accident vasculaire l'a empêché d'exercer sa fonction au début des années 2000.
Face à lui, un seul candidat pour le moment : Gilles Bernheim, né en 1952, grand rabbin de la synagogue de la Victoire à Paris. Cet intellectuel reconnu responsable du département Torah et société au Consistoire de Paris , s'était déjà présenté en 1994. Au terme d'une campagne «très rude», il n'était pas parvenu à se faire élire par les 300 représentants des consistoires régionaux.
«Joseph Sitruk, reconnaît-il, a imprimé sa marque sur le judaïsme français et le désir de judaïté dans nombres de foyers, avec ses formes propre de charisme et d'intelligence.» « Mais une institution qui ne se renouvelle pas est appelée à mourir», prévient-il avant d'ajouter que «le renouveau de l'ensemble des cadres» permet d'éviter «toute forme de carriérisme, de clientélisme et de clanisme ». Il redoute que les enjeux, comme en 1994, quittent le terrain français pour s'enliser dans la complexité des courants rabbiniques en Israël.
Concernant le lien entre les deux états, point névralgique de la vie juive, Gilles Bernheim analyse qu'ils sont pour lui «comme un père et une mère», sans pouvoir attribuer les rôles.
«Ouverture et dialogue»
«J'ai des parents qui s'entendent bien et cela m'aide à vivre», ajoute-t-il s'inquiétant du nombre «croissant» de «cadres» tentés de «monter» vers Israël pour des raisons religieuses ou d'antisémitisme. Il refuse cependant de «comparer la situation des années 1930 à celle d'aujourd'hui». Le grand rabbin prône « l'ouverture et le dialogue » sans craindre pour autant de défendre «un judaïsme rigoureusement orthodoxe».
S'il est élu, le duo national sera renouvelé puisque Jean Kahn, 78 ans, grande figure du judaïsme français et président du Consistoire depuis 1995, ne se représente pas. Un seul candidat s'est déclaré pour l'instant : le vice-président du Consistoire et président à Marseille, Zvi Ammar. Président du Consistoire de Paris, Joël Mergui qui inaugure dimanche le nouveau centre pour étudiants Edmond-Fleg , hésite encore à se lancer.
Dernière élection, celle du grand rabbinat de Paris. De jeunes rabbins aussi «modernes» qu'attachés aux traditions pourraient se retrouver face à David Messas, 72 ans, qui brigue un troisième mandat sur les traces de son père, grand rabbin de Jérusalem à 97 ans. Outre un rabbin de Levallois de 37 ans, Mikaël Journo, 34 ans, brûle de se présenter. Bras droit du rabbin Messas, il est aussi à la tête d'un collectif d'initiatives rabbiniques. «Nous voulons montrer, dit-il, qu'il existe des juifs heureux en France, que les voitures de police devant les synagogues ou les écoles ne nous coupent pas de la société.»
Par Jean-Yves Camus (Chercheur en science politique) 11H51 12/02/2008
Non, le "nouvel antisémitisme" n'a pas totalement remplacé l'ancien, celui de l'extrême droite. Celui-ci existe bel et bien, y compris dans la police. Les trois policiers en poste à Amiens, mis en examen pour avoir, dans la nuit du 1er au 2 février, alors qu'ils se trouvaient après leur service dans un bar de la ville, tenu des propos antisémites, en sont la preuve. Et leur dérapage pose la question de savoir pourquoi un d’entre eux au moins, connu pour son engagement public au Front national, n’a visiblement jamais attiré l’attention de sa hiérarchie, après avoir été muté, de Paris vers la Somme.
Un ex-candidat du Front national
Le brigadier-chef Christophe Lengelé, 39 ans, était en effet, en 2002, candidat suppléant aux législatives sous l’étiquette du Front national dans sixième circonscription de la Somme. Sa sœur portait les couleurs du parti dans le Rhône. Son épouse est actuellement conseillère régionale FN de Picardie. Il serait également membre de la FPIP (Fédération professionnelle indépendante de la police), un petit syndicat très marqué à droite de la droite. Et son militantisme était déjà connu à Paris, quand il y était en poste.
A Amiens même, il ne faisait pas mystère de ses idées, puisqu’il était encore candidat aux élections au comité central du FN, en novembre 2007. Ce qui relativise la portée de la réaction de Michel Guiniot, le président du groupe FN au conseil régional de Picardie, qui s’était déclaré "abasourdi" par l’affaire et avait rappelé sa réputation "d’avoir systématiquement fait le ménage dans ma fédération (…)", ajoutant: "Chaque fois que je détecte un skinhead, il est écarté."
Or, parmi les propos qui sont reprochés au trio, figure une référence explicite au "white power", idéologie raciste primaire prônant la suprématie de la race blanche, et particulièrement propagée par les milieux skinhead.
Les exceptions d'une police majoritairement républicaine
Très majoritairement républicaine, la police nationale n’en est pourtant pas à la première affaire mettant en cause des militants de la droite la plus extrême. La dernière "grosse affaire" remonte cependant à la fin des années 80, lorsque des militants néo-nazis du Parti nationaliste français et européen (PNFE) participent, en 1988, à une série d’attentats contre des foyers Sonacotra dans le sud de la France. Atypiques dans leur origine, ces actions n’en sont pas moins meurtrières: commises à Cannes en mai 1988 et à Cagnes-sur-Mer en décembre de la même année contre des foyers de la Côte d’Azur, elles ont fait un mort et des blessés.
Se croyant malins, et voulant envenimer les relations entre juifs et musulmans, ils avaient revendiqué l’action au nom d’une organisation juive. Très vite pourtant, l’enquête s’était orientée vers le PNFE, dont l’encadrement s’avéra être largement composé de policiers. Furent ainsi appréhendés quatre policiers, membres de la FPIP, dont le procès eut lieu en 1991et qui furent révoqués de la police.
Un phénomène plus répandu chez les militaires
L’un d’eux, Serge Lecanu, était carrément le secrétaire général de la FPIP, qui a depuis évolué vers des eaux plus calmes, bien que toujours proches de la droite la plus dure. Un autre, Philippe Caplain, devint responsable départemental du département Protection Sécurité, le service d’ordre du FN, dans les Hauts-de-Seine.
De pareilles affaires, la commission d’enquête parlementaire sur le DPS, en avait soulevé plusieurs lors de ses travaux, en 1999: un gardien de la paix, cadre d’un groupe néo-nazi alsacien dissous par le conseil des ministres en 1993, responsable DPS pour le "Grand Est", avait été révoqué de la police en 1994 ; un brigadier de police en poste à Clermont-Ferrand, était responsable départemental DPS du Puy-de-Dôme, tandis qu’un ancien sous-brigadier occupait la même fonction dans l’Isère. Des cas individuels qui ne sont pas anodins, mais qui ne doivent pas masquer le fait que la commission d’enquête avait épinglé davantage encore d’anciens militaires que de policiers.
0 Comments:
Post a Comment
<< Home