Saturday, January 07, 2006

A Marseille, l'Aïd el Kebir veut devenir une fête française

Une association marseillaise invite depuis deux ans tous les habitants de la ville à partager la fête de l'Aïd, l'une des plus grandes célébrations musulmanes, pour qu'elle ne soit plus réduite aux images sanguinolentes de moutons égorgés et fasse partie du paysage national au même titre que Noël.
"C'est un événement culturel que nous souhaitons institutionnaliser", explique Nourredine Haggoug, administrateur de l'Union des familles musulmanes (UFM), à l'origine de l'événement baptisé "l'Aïd dans la cité" et seule association musulmane laïque agréée par l'Union nationale des associations familiales (Unaf).
"Noël, c'est aussi notre fête à nous, non chrétiens, et nous souhaitons que l'Aïd devienne aussi une fête pour tous", ajoute-t-il, soulignant: "On veut enraciner le fait musulman en France, banaliser la présence des familles musulmanes. Mais c'est vrai que cela avance très doucement, on a même l'impression que cela recule".
L'initiative, unique en France, est née d'un "ras-le-bol de l'image, pas très sympathique des musulmans à cette occasion, renvoyée par les médias, explique la présidente de l'UFM, Nassera Benmarnia, évoquant "le sang, les +intégristes+ qui se bousculent à la mosquée, prient sur les trottoirs" qui reviennent souvent dans les reportages.
Avec "l'Aïd dans la cité", Mme Benmarnia espère qu'on parlera davantage de culture et du symbole du partage qui sous-tend cette fête, à l'occasion de laquelle les musulmans distribuent gâteaux, couscous et offrent les deux tiers du mouton acheté aux pauvres et aux amis.
La date officielle de l'Aïd el Kebir a été fixée cette année au 10 janvier. "L'Aïd dans la cité", comme l'an dernier, a été programmée lors de la semaine qui le précède. Débats, projections de films, concerts et festivités ont été programmés dans les lieux les plus en vue de Marseille: bibliothèque de l'Alcazar, cinéma le Variété, salle de concert l'Espace Julien et Docks du Sud. Autant "d'endroits où on ne nous attend pas", explique Mme Benmarnia.
En 2005, "l'Aïd dans la cité" a reçu 13.000 visiteurs, dont un tiers de culture non-musulmane, se réjouit-elle.
Aïcha G., cuisinière bénévole, est encore émue de cet afflux de "Gaulois" ainsi que de la visite du maire Jean-Claude Gaudin et de nombreux autres officiels. "Il fallait ce genre d'événement pour mieux nous faire connaître, pour faire connaître notre religion", dit-elle avant de s'enthousiasmer: "On peut faire quelque chose, partager, vivre tous ensemble, cette fête le montre".
Mme Benmarnia a dû batailler durant sept ans pour que cet événement, qui mobilise une cinquantaine d'associations et une centaine de bénévoles, voit le jour, et ailleurs que "dans les quartiers".
Elle a réussi à obtenir des subventions de la mairie, du conseil général et du conseil régional. La mairie de Marseille s'est particulièrement investie dans la communication en offrant ses panneaux pour cette fête qui concerne 200.000 marseillais, soit un habitant sur quatre, rappelle un collaborateur de M. Gaudin.
Ce même collaborateur juge que l'expérience marseillaise "peut se développer et essaimer" ailleurs en France car "si la religion peut diviser les gens, la culture les rapproche".

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