Friday, March 10, 2006

Paris, l'humoriste a été condamné à 5 000 euros d'amende pour diffamation.
Dieudonné ne fait plus rire la justice
par Didier ARNAUDQUOTIDIEN : samedi 11 mars 2006






Il n'était pas là, Dieudonné, pour écouter sa peine. Ni lui, ni ses partisans. Pas de bousculades. Pas de bruit. Avec le «comique», c'est inhabituel. L'homme est plus familier des mayonnaises qui montent que du silence. Vendredi, la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris a moyennement apprécié ses provocations. Elle a condamné Dieudonné M'Bala M'Bala à 5 000 euros d'amende pour diffamation. Le tribunal a reconnu que ce qu'il disait dans le Journal du Dimanche du 8 février 2004 était «discriminant et haineux» à l'égard de la communauté juive. Ses propos ont causé un «trouble à l'ordre public». Dieudonné avait notamment expliqué dans une interview : «Voilà le genre de slogans que j'ai entendus (lors d'incidents qui ont perturbé un spectacle qu'il donnait à la bourse du travail de Lyon, ndlr) : "Sale nègre" ou "Les juifs auront ta peau". Ce sont tout ces négriers reconvertis dans la banque, le spectacle et aujourd'hui l'action terroriste, qui manifestent leur soutien à la politique d'Ariel Sharon. Ceux qui m'attaquent ont fondé des empires et des fortunes sur la traite des noirs et l'esclavage.»
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Le tribunal a été clair : la référence que tire Dieudonné de cette communauté par l'expression «reconvertis dans la banque et le spectacle» est directement inspirée de l'imagerie antisémite. Son jugement enfonce le clou : «Sous couvert de stigmatiser ses détracteurs, il (Dieudonné) désigne à la vindicte les juifs en les assimilant à des marchands d'esclaves qui auraient bâti des fortunes sur la traite des noirs, ayant ainsi tiré profit d'un crime contre l'humanité.» Pour Dieudonné, c'est presque une première. Souvent il dérape, sur les juifs et la Shoah. La plupart du temps, il est relaxé. A une exception près, une condamnation en première instance en janvier 2001 pour avoir qualifié les Blancs et catholiques d'«esclavagistes» et de «racistes». Mais il a obtenu gain de cause en appel.
Relaxé vingt fois. Contacté par Libération, Dieudonné ne varie pas dans sa ligne de défense. «Les médias» ne parlent pas de ses relaxes : «Je n'ai pas accès à la tribune. J'ai été relaxé vingt fois. C'est du deux poids, deux mesures dans le traitement de l'information», explique-t-il. Même antienne reprise par Marc Robert, son coordinateur de campagne ­ car Dieudonné compte être candidat à la présidentielle. Selon Robert, Dieudonné visait, dans le JDD, «un groupe d'individus ultrasionistes qui ont attaqué un théâtre à Lyon», des «agresseurs racistes qui, eux, n'ont pas été condamnés». Marc Robert a son analyse : «Le ras-le-bol va monter d'un cran dans cette mobilisation pour Dieudonné contre le quasi-monopole dont disposent certains.» Me François Roux, l'avocat de Dieudonné ­ et défenseur de Zacarias Moussaoui et de José Bové ­ a annoncé son intention de faire appel. «Nous n'avons pas la même appréciation que celle qu'ont eue les juges», dit-il sobrement.
«Point d'arrêt». Vendredi, Patrick Klugman, partie civile pour SOS Racisme, ne cachait pas sa satisfaction : «Nous obtenons pour Dieudonné des décisions du même ordre que pour d'autres leaders racistes.» Selon lui, il n'y a pas de bonnes et de mauvaises incitations à la haine raciale. Jean-Claude Cohen, défenseur de l'Union des étudiants juifs de France (UEJF), insistait sur le fait que cette condamnation mettait «un point d'arrêt» aux dérapages de Dieudonné. Pour Cohen, ces débordements peuvent avoir des conséquences sur des personnes «aux comportements influençables». Car ces déclarations impunies peuvent avoir un effet de «caisse de résonance» dans le contexte actuel.
Patrick Klugman dit que les propos tenus dans le JDD étaient «les plus graves et les plus condamnables». Même si, précise l'avocat, ses précédentes sorties l'étaient tout autant. «Dieudonné, c'est : "Dites (des horreurs, ndlr) avec des fleurs." Il sème le trouble. On a besoin de dresser des lignes de front contre des gens qui tiennent des propos racistes comme lui.» Klugman trouve qu'aujourd'hui, il y a une «libération de la parole raciste» qui fausse les repères et les règles. Dieudonné a dit pour sa part qu'il ne commenterait pas une décision de justice, mais qu'il parlerait du jugement «dès ce soir, sur la scène de mon théâtre». Sa pièce s'appelle Dépôt de bilan. Le public, selon Dieudonné ? «Les gens qui y vont sont ceux qui veulent rire sur des sujets nouveaux.» Tout un programme ?



Dieudonné condamné à 5.000 euros d'amende pour des propos antisémites AFP 10.03.2006 - 15:04
Le tribunal correctionnel de Paris a condamné vendredi l'humoriste Dieudonné à 5.000 euros d'amende pour des propos antisémites comparant les "juifs" à des "négriers" dans une interview au Journal du dimanche (JDD) en février 2004.
Dieudonné M'Bala M'Bala, absent à la lecture du jugement, a été reconnu coupable d'"incitation à la haine raciale" par la 17e chambre correctionnelle.
Le tribunal l'a également condamné à publier le jugement dans quatre journaux : le Journal du dimanche, le Monde, le Figaro et Libération.
Il devra aussi verser un euro symbolique de dommages et intérêts à la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (LICRA), à l'Union des étudiants juifs de France (UEJF), au Consistoire israélite de France, à Avocats sans frontières et à SOS Racisme, associations parties civiles.
Dans le JDD, le 8 février 2004, Dieudonné avait déclaré: "+sale nègre, les juifs auront ta peau+, voilà le genre de slogans que j'ai entendus. Ce sont tous ces négriers reconvertis dans la banque, le spectacle et aujourd'hui l'action terroriste qui manifestent leur soutien à la politique d'Ariel Sharon".
"Ceux qui m'attaquent ont fondé des empires et des fortunes sur la traite des Noirs et l'esclavage", ajoutait Dieudonné qui s'exprimait après des incidents survenus lors d'un de ses spectacles à Lyon, au cours duquel des manifestants d'organisations juives l'avaient pris à partie.
Lors de l'audience de fond le 27 janvier, Dieudonné M'Bala M'Bala, candidat à la présidentielle de 2007, s'était défendu d'avoir voulu assimilé "juifs" et négriers", expliquant qu'il faisait référence au soutien "indéfectible" qu'Israël avait pu apporter au gouvernement d'apartheid en Afrique du Sud "qui opprimait les Noirs".
Le parquet avait demandé sa condamnation estimant que Dieudonné avait eu recours à un "cliché antisémite".

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