DISCOURS DU PRESIDENT DU 14 JUILLET
Palais de l'Élysée, le vendredi 14 juillet 2006
QUESTION - Je ne sais pas si vous avez un petit pincement au cœur à l'idée de nous répondre une dernière fois en tant que Président, ici même, à moins que vous ne décidiez de vous représenter, ça vous nous le direz peut-être tout à l'heure. Avec David PUJADAS, en attendant, nous avons un certain nombre de questions à vous poser, à commencer, bien sûr, par l'actualité la plus brûlante, le Proche-Orient, puisque le Liban et Israël s'embrasent aujourd'hui. On a vu des réactions assez différentes de la part, d'abord, de l'Union européenne qui juge, disons disproportionnée la réaction israélienne. En revanche, Georges BUSH la juge légitime.On a l'impression qu'à partir du moment où il l'a dit, finalement, le monde entier ne bougera pas le petit doigt. Qu'attendez-vous du Conseil de sécurité de l'ONU aujourd'hui ?
LE PRESIDENT - Permettez-moi, Monsieur POIVRE D'ARVOR, avant de répondre sur ce sujet dramatique, s'agissant du 14 juillet, de rendre hommage, au nom de toutes les Françaises et tous les Français, qui peuvent en être fiers, à l'armée française pour son action à l'extérieur de nos frontières ou à l'intérieur et pour le défilé superbe qu'elle nous a donné aujourd'hui. Je veux dire à tous nos soldats, hommes et femmes désormais, des trois armes et de la gendarmerie mes sentiments de reconnaissance, d'estime et d'amitié.
QUESTION - En espérant qu'elle n'ait pas à être sur ce nouveau terrain qu'est le Proche-Orient.
LE PRESIDENT - Certes. Je suis tout à fait consterné par ce qui se passe actuellement au Proche-Orient. On avait imaginé, j'avais imaginé, il y a peu de temps, quelques semaines, que l'on était engagé sur la voie de la stabilité et de la paix. J'avais eu l'occasion, à l'époque, de rencontrer d'abord M. Mahmoud ABBAS, ensuite ici à Paris M. Ehud OLMERT, le Premier ministre d'Israël, et j'avais le sentiment que l'on était bien engagé sur la voie de la paix. Et puis les évènements ont contredit cette approche.
QUESTION - Et là, qui est responsable : Israël, le Hezbollah, la Syrie, l'Iran ?
LE PRESIDENT - Dans une affaire de cette nature, tout le monde est responsable.
QUESTION - Il n'y a pas un agresseur et un agressé ?
LE PRESIDENT - Oui, il y a effectivement un agresseur et un agressé mais tout dépend de la définition que l'on donne à ces termes. Je voudrais tout d'abord dire que, si j'en crois les dernières nouvelles, celles de ce matin, on peut se demander s'il n'y a pas, aujourd'hui, une volonté de détruire le Liban, ses équipements, ses routes, ses communications, son énergie, son aérodrome.
Et pourquoi ? Le Liban est un pays avec lequel la France a, depuis très longtemps, des relations d'amitié, de solidarité. La France est donc particulièrement sensible à ce sujet. Je trouve, honnêtement, comme l'ensemble des Européens, que les réactions actuelles sont tout à fait disproportionnées.
QUESTION - Est-ce qu'il n'y a pas une forme, tout de même, de passivité vis-à-vis d'Israël parce que la même situation s'est produite, il y a quinze jours, à Gaza, là aussi, on a parlé de réaction disproportionnée. Est-ce que cette passivité, à part dans les mots, ne laisse pas le champ libre à l'expression de cette violence excessive, d'après vous ?
LE PRESIDENT - Il faut prendre maintenant des initiatives, elles sont urgentes. J'ai eu longuement hier au téléphone le Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi ANNAN. Je lui ai suggéré une initiative. Je suis heureux qu'il l'ait finalement retenue, si j'en crois les décisions qui ont été prises ce matin et qui consistent à envoyer de toute urgence une mission de l'ONU sur place, une mission représentant le Secrétaire général et apte à parler avec tout le monde. Une mission qui doit aller au Liban -si elle peut y accéder car, pour le moment, on ne peut pas atterrir- mais qui doit également aller en Israël, à Ramallah. Elle doit aller dans les principaux pays arabes concernés, l'Égypte, l'Arabie Saoudite, la Jordanie, le Qatar, et terminer par la Syrie. Je dis terminer par la Syrie parce qu'il y a, sans aucun doute, au coeur de l'ensemble de ce problème une action qui a besoin d'être discutée avec la Syrie.
Cette mission devrait donc avoir quelles responsabilités, quels objectifs ? Ce que j'ai dit à Kofi ANNAN, c'est que l'objectif principal est d'obtenir la libération des prisonniers israéliens détenus, les trois soldats, le caporal SHALIT, qui a été pris par le Hamas, et les deux soldats qui ont été pris par le Hezbollah au Liban. Cela, c'est capital. Deuxièmement, obtenir le cessez-le-feu total. Troisièmement, étudier les modalités de mise en œuvre d'une protection militaire à la frontière d'Israël et du Liban, à l'image de celle que nous avions faite avec le Liban, il y a quelques années.
QUESTION - Une sorte de zone tampon ?
LE PRESIDENT - Oui. En tous les cas, une sécurité militaire internationale et pour éviter ce genre de cas car, parmi les objectifs essentiels, il y a de la part du Hezbollah, de la part du Hamas, la nécessité de cesser ce qui est inadmissible, inacceptable et irresponsable. Les tirs de fusée sont réguliers maintenant, à partir du territoire palestinien sur Israël, ce qui n'est pas acceptable. Il y a donc une espèce de processus qui est porté d'une part par le Hamas et d'autre part par le Hezbollah et qui, dans le système provocation/répression, risque de nous amener, Dieu seul sait où, et en tous les cas, de mener le Liban au drame. Ces gens sont absolument irresponsables, notamment à l'égard des populations du Liban.
QUESTION - Est-ce que vous voyez derrière le Hezbollah la main de l'Iran, également, dont on sait qu'un bras de fer est engagé avec la communauté internationale ?
LE PRESIDENT – Je ne veux pas porter de jugement définitif. Mais j'ai le sentiment, pour ne pas dire la conviction, que le Hamas de son côté, le Hezbollah du sien, ne peuvent pas avoir pris ces initiatives tout à fait seuls et que, par conséquent, il y a quelque part un soutien de la part de telle ou telle nation.
QUESTION - Ce serait de la part de l'Iran, par exemple, le désir de détourner l'attention de l'arme nucléaire ? Vous pensez que l'Iran aura l'arme nucléaire dans les deux ans à venir ?
LE PRESIDENT – Cela, c'est un autre problème, nous allons y venir, j'imagine. Ce que je sais, c'est que je me réjouis que le Secrétaire général ait accepté d'envoyer cette mission. Deuxièmement, j'ai aussi demandé que l'Union européenne envoie d'urgence M. Javier SOLANA. Je crois comprendre que ce sera également exécuté.
En tous les cas, nous devons être en permanence en initiative sur cette affaire qui est tout à fait dramatique.
QUESTION - Sur l'arme nucléaire iranienne, les positions ne sont pas claires entre les Américains, les Russes, les Européens. Et pendant ce temps-la, ils construisent, développent cet armement nucléaire···
LE PRESIDENT – Vous avez dit que les choses ne sont pas tout à fait claires en ce qui concerne le jugement porté sur les réactions d'Israël à l'égard du Liban. Elles me paraissent beaucoup plus claires en ce qui concerne la position à l'égard de la progression de l'Iran vers la mise en œuvre d'une arme nucléaire. Vous le savez en 2004, à travers les accords de Paris, la France, avec l'Allemagne et l'Angleterre, avait négocié un accord avec l'Iran qui avait pour l'objectif de mettre un terme à l'enrichissement de l'uranium, c'est-à-dire aux technologies qui permettent d'accéder à l'arme nucléaire. Puis, en 2005, il y a eu le changement politique en Iran, et l'Iran a dénoncé, en quelque sorte, cet accord et s'est engagé à nouveau, presque à marches forcées, vers la construction de centrifugeuses, vers la mise au point des technologies permettant d'avoir l'arme nucléaire.
Alors là, il y a tout de même eu une réaction internationale forte, à laquelle d'ailleurs nous avons beaucoup participé puisqu'aux trois pays initiaux, l'Allemagne, l'Angleterre et la France, se sont joints les États-Unis, la Russie et la Chine. Il y a aujourd'hui un accord et un front commun de la part de ces six pays, auxquels s'ajoutent quelques autres, pour avoir une position extrêmement ferme, ouverte, de main tendue à l'égard de l'Iran. On a fait des propositions à l'Iran concernant la coopération nucléaire civile, à laquelle ils ont droit et que nous ne contestons pas, concernant la coopération économique, concernant la stabilité politique dans la région. Et au fond, concernant un élément qui, pour les Iraniens, est en réalité essentiel, même si on n'en parle pas beaucoup : c'est une espèce de reconnaissance par les Américains du régime iranien.
QUESTION - Je ne sais pas si vous avez un petit pincement au cœur à l'idée de nous répondre une dernière fois en tant que Président, ici même, à moins que vous ne décidiez de vous représenter, ça vous nous le direz peut-être tout à l'heure. Avec David PUJADAS, en attendant, nous avons un certain nombre de questions à vous poser, à commencer, bien sûr, par l'actualité la plus brûlante, le Proche-Orient, puisque le Liban et Israël s'embrasent aujourd'hui. On a vu des réactions assez différentes de la part, d'abord, de l'Union européenne qui juge, disons disproportionnée la réaction israélienne. En revanche, Georges BUSH la juge légitime.On a l'impression qu'à partir du moment où il l'a dit, finalement, le monde entier ne bougera pas le petit doigt. Qu'attendez-vous du Conseil de sécurité de l'ONU aujourd'hui ?
LE PRESIDENT - Permettez-moi, Monsieur POIVRE D'ARVOR, avant de répondre sur ce sujet dramatique, s'agissant du 14 juillet, de rendre hommage, au nom de toutes les Françaises et tous les Français, qui peuvent en être fiers, à l'armée française pour son action à l'extérieur de nos frontières ou à l'intérieur et pour le défilé superbe qu'elle nous a donné aujourd'hui. Je veux dire à tous nos soldats, hommes et femmes désormais, des trois armes et de la gendarmerie mes sentiments de reconnaissance, d'estime et d'amitié.
QUESTION - En espérant qu'elle n'ait pas à être sur ce nouveau terrain qu'est le Proche-Orient.
LE PRESIDENT - Certes. Je suis tout à fait consterné par ce qui se passe actuellement au Proche-Orient. On avait imaginé, j'avais imaginé, il y a peu de temps, quelques semaines, que l'on était engagé sur la voie de la stabilité et de la paix. J'avais eu l'occasion, à l'époque, de rencontrer d'abord M. Mahmoud ABBAS, ensuite ici à Paris M. Ehud OLMERT, le Premier ministre d'Israël, et j'avais le sentiment que l'on était bien engagé sur la voie de la paix. Et puis les évènements ont contredit cette approche.
QUESTION - Et là, qui est responsable : Israël, le Hezbollah, la Syrie, l'Iran ?
LE PRESIDENT - Dans une affaire de cette nature, tout le monde est responsable.
QUESTION - Il n'y a pas un agresseur et un agressé ?
LE PRESIDENT - Oui, il y a effectivement un agresseur et un agressé mais tout dépend de la définition que l'on donne à ces termes. Je voudrais tout d'abord dire que, si j'en crois les dernières nouvelles, celles de ce matin, on peut se demander s'il n'y a pas, aujourd'hui, une volonté de détruire le Liban, ses équipements, ses routes, ses communications, son énergie, son aérodrome.
Et pourquoi ? Le Liban est un pays avec lequel la France a, depuis très longtemps, des relations d'amitié, de solidarité. La France est donc particulièrement sensible à ce sujet. Je trouve, honnêtement, comme l'ensemble des Européens, que les réactions actuelles sont tout à fait disproportionnées.
QUESTION - Est-ce qu'il n'y a pas une forme, tout de même, de passivité vis-à-vis d'Israël parce que la même situation s'est produite, il y a quinze jours, à Gaza, là aussi, on a parlé de réaction disproportionnée. Est-ce que cette passivité, à part dans les mots, ne laisse pas le champ libre à l'expression de cette violence excessive, d'après vous ?
LE PRESIDENT - Il faut prendre maintenant des initiatives, elles sont urgentes. J'ai eu longuement hier au téléphone le Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi ANNAN. Je lui ai suggéré une initiative. Je suis heureux qu'il l'ait finalement retenue, si j'en crois les décisions qui ont été prises ce matin et qui consistent à envoyer de toute urgence une mission de l'ONU sur place, une mission représentant le Secrétaire général et apte à parler avec tout le monde. Une mission qui doit aller au Liban -si elle peut y accéder car, pour le moment, on ne peut pas atterrir- mais qui doit également aller en Israël, à Ramallah. Elle doit aller dans les principaux pays arabes concernés, l'Égypte, l'Arabie Saoudite, la Jordanie, le Qatar, et terminer par la Syrie. Je dis terminer par la Syrie parce qu'il y a, sans aucun doute, au coeur de l'ensemble de ce problème une action qui a besoin d'être discutée avec la Syrie.
Cette mission devrait donc avoir quelles responsabilités, quels objectifs ? Ce que j'ai dit à Kofi ANNAN, c'est que l'objectif principal est d'obtenir la libération des prisonniers israéliens détenus, les trois soldats, le caporal SHALIT, qui a été pris par le Hamas, et les deux soldats qui ont été pris par le Hezbollah au Liban. Cela, c'est capital. Deuxièmement, obtenir le cessez-le-feu total. Troisièmement, étudier les modalités de mise en œuvre d'une protection militaire à la frontière d'Israël et du Liban, à l'image de celle que nous avions faite avec le Liban, il y a quelques années.
QUESTION - Une sorte de zone tampon ?
LE PRESIDENT - Oui. En tous les cas, une sécurité militaire internationale et pour éviter ce genre de cas car, parmi les objectifs essentiels, il y a de la part du Hezbollah, de la part du Hamas, la nécessité de cesser ce qui est inadmissible, inacceptable et irresponsable. Les tirs de fusée sont réguliers maintenant, à partir du territoire palestinien sur Israël, ce qui n'est pas acceptable. Il y a donc une espèce de processus qui est porté d'une part par le Hamas et d'autre part par le Hezbollah et qui, dans le système provocation/répression, risque de nous amener, Dieu seul sait où, et en tous les cas, de mener le Liban au drame. Ces gens sont absolument irresponsables, notamment à l'égard des populations du Liban.
QUESTION - Est-ce que vous voyez derrière le Hezbollah la main de l'Iran, également, dont on sait qu'un bras de fer est engagé avec la communauté internationale ?
LE PRESIDENT – Je ne veux pas porter de jugement définitif. Mais j'ai le sentiment, pour ne pas dire la conviction, que le Hamas de son côté, le Hezbollah du sien, ne peuvent pas avoir pris ces initiatives tout à fait seuls et que, par conséquent, il y a quelque part un soutien de la part de telle ou telle nation.
QUESTION - Ce serait de la part de l'Iran, par exemple, le désir de détourner l'attention de l'arme nucléaire ? Vous pensez que l'Iran aura l'arme nucléaire dans les deux ans à venir ?
LE PRESIDENT – Cela, c'est un autre problème, nous allons y venir, j'imagine. Ce que je sais, c'est que je me réjouis que le Secrétaire général ait accepté d'envoyer cette mission. Deuxièmement, j'ai aussi demandé que l'Union européenne envoie d'urgence M. Javier SOLANA. Je crois comprendre que ce sera également exécuté.
En tous les cas, nous devons être en permanence en initiative sur cette affaire qui est tout à fait dramatique.
QUESTION - Sur l'arme nucléaire iranienne, les positions ne sont pas claires entre les Américains, les Russes, les Européens. Et pendant ce temps-la, ils construisent, développent cet armement nucléaire···
LE PRESIDENT – Vous avez dit que les choses ne sont pas tout à fait claires en ce qui concerne le jugement porté sur les réactions d'Israël à l'égard du Liban. Elles me paraissent beaucoup plus claires en ce qui concerne la position à l'égard de la progression de l'Iran vers la mise en œuvre d'une arme nucléaire. Vous le savez en 2004, à travers les accords de Paris, la France, avec l'Allemagne et l'Angleterre, avait négocié un accord avec l'Iran qui avait pour l'objectif de mettre un terme à l'enrichissement de l'uranium, c'est-à-dire aux technologies qui permettent d'accéder à l'arme nucléaire. Puis, en 2005, il y a eu le changement politique en Iran, et l'Iran a dénoncé, en quelque sorte, cet accord et s'est engagé à nouveau, presque à marches forcées, vers la construction de centrifugeuses, vers la mise au point des technologies permettant d'avoir l'arme nucléaire.
Alors là, il y a tout de même eu une réaction internationale forte, à laquelle d'ailleurs nous avons beaucoup participé puisqu'aux trois pays initiaux, l'Allemagne, l'Angleterre et la France, se sont joints les États-Unis, la Russie et la Chine. Il y a aujourd'hui un accord et un front commun de la part de ces six pays, auxquels s'ajoutent quelques autres, pour avoir une position extrêmement ferme, ouverte, de main tendue à l'égard de l'Iran. On a fait des propositions à l'Iran concernant la coopération nucléaire civile, à laquelle ils ont droit et que nous ne contestons pas, concernant la coopération économique, concernant la stabilité politique dans la région. Et au fond, concernant un élément qui, pour les Iraniens, est en réalité essentiel, même si on n'en parle pas beaucoup : c'est une espèce de reconnaissance par les Américains du régime iranien.
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