Sunday, December 07, 2008

H’assidisme authentique, H’assidisme dévoyé…

mer ,3 déc 2008

Dépêches, Editoriaux,

Les traumatismes laissés dans le peuple juif par les épisodes des mystiques faux-messies, Sabbataï Tzvi ou Jacob Frank, ainsi que par les massacres de Chmielnitzki, avaient poussé les instances juives du 17e siècle à recentrer la vie juive sur l’étude des textes et une certaine vision académique du vécu juif, mais souvent dénués de spiritualité et de joie, et réservée par la force des choses à une élite intellectuelle.

Lorsque naquit le Hassidisme au 18e siècle, plus qu’un mouvement religieux, ce fut avant tout une impulsion populaire qui se voulait en rupture avec le Judaïsme rabbinique de l’époque, et qui voulait restaurer certaines valeurs fondamentales de la vie juive quelque peu délaissées par les élites de l’époque : joie, ferveur, amour du prochain, entraide. Les Maîtres du Hassidisme mirent d’abord en opposition la dialectique casuistique, la halakha stricte et une certaines austérité d’un côté, avec la mystique, la spiritualité intérieure et la joie de vivre de l’autre, ce qui donna lieu à un véritable schisme entre les Hassidim et leurs opposants, appelés stricto sensu « Mitnagdim », qui les accusaient de réduire le Judaïsme à un pur folklore. Plus tard, certains grands Maîtres, tel le « Tsemah’ Tsedek » de la dynastie Loubavitch, tentèrent une synthèse afin que le mouvement hassidique n’aille pas trop loin dans sa volonté de « révolutionner la vie juive ».

Presque trois siècles plus tard, le monde hassidique est loin d’être homogène. Les circonstances historiques locales, les personnalités et les enseignements des Maîtres de chacune des nombreuses branches ont donné naissance à d’innombrables manières « d’être Hassid ».

Tout près de nous, les terribles attentats de Bombay ont permis de mettre en exergue deux manières totalement antinomiques de concevoir et vivre la H’assidout.

En quelques jours, le peuple juif entier a pu être le témoin du rôle primordial que joue la H’assidout Habad dans le tissu social juif planétaire. Les héros malgré-eux de cette horrible tragédie, en l’occurrence le Rav Gavriel Holtzberg z.l. et sa femme Rivka z.l., faisaient partie de ces milliers de h’assidé H’abad qui avec un dévouement et une abnégation sans pareils, acceptent de vivre dans des environnements souvent difficiles, dans le seul but de constituer un phare et une source de chaleur pour tout Juif qui se trouve dans les régions parfois les plus reculées – résident comme touriste. L’amour du prochain, pratiqué corps, âme et biens par les adeptes du Rabbi de Loubavitch, sont l’incarnation pure de ce que voulaient les fondateurs du H’assidisme : « Quel que soit le Juif, où qu’il soit, et quel que soit son degré de pratique, il est mon frère. Et pour cela, je dois l’aimer et l’aider ».

Aimer et accueillir n’importe quel Juif, même s’il professe des idées totalement opposées aux miennes, est l’une des devises de H’abad, et c’est la raison pour laquelle, le sort a voulu que soient assassinés ensemble, dans ce même local de Beit H’abad de Bombay, le couple H’abad Holtzberg z.l., et Aryeh Leib Teitelbaum z.l. , membre du courant h’assidique Satmar.

Dès la confirmation de la mort des neuf Juifs, le gouvernement israélien a proposé ses services pour le rapatriement des corps et pour leur accorder des funérailles nationales. Le fait que le courant Satmar ait pour étendard une opposition radicale au Sionisme n’aurait pas du, en de telles circonstances dramatiques, jouer un rôle dans ces événements, ni même être mis en avant.

Or, l’unité de sentiments créée par ce carnage aveugle a été brisée par la « montée aux barricades » de la famille de la victime, appuyée par les responsables de la H’assidout Satmar, contre le souhait d’Israël de considérer les victimes de l’attentat comme « victimes du terrorisme », et de financer leurs obsèques. Dans un communiqué d’une rare violence adressé au ministre Yaakov Edery, responsables des Cérémonies officielles, la famille déclarait lundi : « Nous ne voulons pas que l’Etat d’Israël se mêle de notre deuil, Aryeh Leib Teitelbaum z.l. n’était pas un émissaire sioniste envoyé par Israël, et cet Etat n’a pas le droit de ‘danser autour de son cadavre’. Un enterrement sioniste serait une profanation de la mémoire du défunt» !!!

La famille demandait également « à ce que le cercueil ne soit pas couvert d’un drapeau israélien, et qu’aucun officiel israélien ne soit présent à l’aéroport pour accueillir la dépouille».

Shmouel Pappenheim, membre de cette H’assidout, allait même jusqu’à accuser Israël « de vouloir profiter des corps de victimes exposés avec le drapeau pour montrer au monde entier que l’Etat d’Israël est victime du terrorisme du Jihad, ce que notre mouvement refuse catégoriquement ». « Il était citoyen américain, et ce n’est pas parce qu’il habitait en Israël que l’Etat a le droit de l’utiliser ainsi » insistait Pappenheim.

Pourquoi tant de haine ? Les Hassidé Satmar se sont ils posés la question du peu d’importance aux yeux des terroristes de la subtile controverse idéologique qui secoue le monde religieux à propos du sionisme ? Et si ce malheureux Aryeh Leib Teitelbaum s’était mis à supplier les terroristes en criant ‘ I am not a Zionist ! I am against Zionism ! ’, aurait-il été épargné pour autant ? Et enfin, l’Etat d’Israël, dans toute son imperfection, n’est-il pas aujourd’hui le plus grand et le plus authentique représentant et responsable du peuple juif toutes tendances confondues ?

H’abad et Satmar sont deux façades antithétiques du H’assidisme. Les premiers privilégient l’amour, les seconds la rigueur. Les premiers rapprochent de la Thora, les seconds, hélas, repoussent. Les premiers font abstraction de ce qui divise ou sépare, les seconds font fi de ce qui nous rassemble et nous unit.

Et au moment où ce commun destin juif se fait au prix de violence et de sang, il aurait exigé plus de compassion de la part de cœurs juif, et non pas de rajouter encore de la haine à la haine.

« Ahavat Israël ! »

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