Tuesday, December 20, 2005

Le petit Mohamed sous les tirs palestiniens ; une analyse rationelle de Macina de l UPJF

Affaire Al-Dura: la bonne et la mauvaise presse selon AcMedias, Menahem Macina


La présente analyse entend se situer dans un contexte totalement dénué de polémique. Elle prend, certes, ses distances - et même se dissocie résolument des thèses systématiquement accusatrices de France 2 et de Charles Enderlin. Elle n'en est pas pour autant partisane. Elle s'adresse au bon sens de nos coreligionnaires et s'efforce, une fois de plus, de dépassionnaliser le débat sur cette regrettable et douloureuse affaire. (Menahem Macina)


Une présentation originale et… très médiatique des positions de la presse, traditionnelle et électronique, sur l’affaire Al-Dura, vient d’être réalisée par le site AC-Medias (1).

Avec tout le respect dû au travail remarquable de débusquage de la désinformation, accompli par cette entité courageuse, force est de constater que son dossier est uniquement à charge, ce qui s’explique sans doute par son ralliement, fin janvier 2005, au camp des détracteurs et accusateurs de France 2 et de Charles Enderlin (2).

On ne trouve, dans ce digest, aucune allusion aux opinions contraires aux thèses accusatrices, considérées, sans état d’âme, comme étant "La" vérité (3). Et l’on doit regretter que s’y exprime, sur un ton majoritairement sarcastique et blessant, une rancœur vindicative à l’encontre de journalistes connus pour leur compétence et leur sérieux, qui se voient accusés de lâcheté et de compromission pour n’avoir pas épousé les thèses les plus extrêmes diffusées par divers relais de presse écrite et électronique (4).

Quant aux sites qui s’efforcent à une plus grande objectivité d’analyse (sans pour autant faire preuve de parti pris, voire de flagornerie envers France 2 et Charles Enderlin, comme on les en accuse à tort), ils sont totalement passés sous silence (5).


Rappelons que, le 30 septembre 2000, Talal Abou Rahma, le caméraman palestinien du journaliste Charles Enderlin, correspondant permanent en Israël de la chaîne de télévision nationale française, France 2, a filmé, apparemment en direct, ce qui semble bien être la mort par balles du jeune Palestinien Mohammed Al-Dura, aux côtés de son père – qui, lui, s’en tirera avec des blessures non fatales. Assez curieusement, France 2 s’est empressée de mettre gracieusement à la disposition de toutes les chaînes nationales et internationales (6) qui en faisaient la demande une séquence vidéo de moins d’une minute, dont nous reproduisons les six clichés qui en sont extraits.


Ces clichés ont fait le tour du monde et causé à l’image et à la crédibilité d’Israël un dommage irréparable. Depuis, à tort ou à raison, un nombre croissant de voix se sont élevées, d’abord pour affirmer que les tirs étaient d’origine palestinienne, et non israélienne, puis, qu’il s’agissait, purement et simplement, d’une mise en scène.

Autant la première affirmation a paru recevable et ne fait plus guère de doute aujourd’hui, autant la seconde s’est heurtée, au moins dans les débuts, à un certain scepticisme.

L’événement dramatique n’est devenu "l’affaire Al-Dura" qu’en raison de l’acharnement de quelques militants juifs, sincèrement persuadés qu’il était de leur devoir de convaincre l’opinion publique qu’on avait affaire, en l’occurrence, à l’une des plus grandes impostures médiatiques de tous les temps.

Enfin, les choses sont en train de tourner au règlement de compte judiciaire, si la direction de France 2 va jusqu’au bout de la plainte en diffamation qu’elle a déposée contre X - à savoir, celles et ceux qu’elle estime être les principaux protagonistes des graves accusations portées directement contre son journaliste et son caméraman, et indirectement contre la chaîne elle-même.

Il faut reconnaître honnêtement que les dénégations et les contradictions de Charles Enderlin sont de nature à jeter le doute sur l’aptitude du journaliste à affronter, sans faux-fuyants, les graves remises en question dont son attitude est l’objet dans cette affaire. Mais de là à affirmer, comme cela a été dit et écrit par divers intervenants, sur base d'hypothèses présentées comme des certitudes, que le document est entièrement mis en scène, et que tant Enderlin que France 2 le savaient, il y a un pas que la majorité des journalistes de métier ont refusé de franchir.

En tout état de cause, en de telles matières, les personnes qui font l’objet de soupçons de malversations, ou de la diffusion volontaire de fausses nouvelles, doivent bénéficier de la présomption d’innocence, que la loi leur garantit, tant que la justice n’a pas rendu un verdict de culpabilité. Aussi bien, continuer à diffuser publiquement des accusations aussi graves, sans en fournir des preuves dignes de ce nom, ne peut se justifier en aucune manière.

Certes, quiconque estime que certains faits sont de nature à blanchir la réputation, gravement atteinte, d’Israël et de son armée, est fondé à investiguer et à diffuser les résultats de ses recherches et de ses hypothèses, pourvu qu’il ne s’érige pas en procureur et en justicier et ne porte pas publiquement atteinte à la réputation de personnes et d’institutions.

Ceci étant dit, le fait est que bien des éléments de cette affaire sont troublants. En particulier, il paraît établi que le jour où s’est produite la fusillade mortelle, plusieurs micro-événements artificiels ont été littéralement mis en scène et filmés par des cameramen palestiniens complaisants, dont l’auteur des prises de vues de la fusillade des Al-Dura. Le phénomène n’est pas nouveau et il a été réédité bien des fois depuis. Le plus cocasse étant celui du pseudo-mort de Jénine, qui, au cours d’un enterrement factice, tombe de sa civière et y remonte précipitamment (7).

Mais le cas al-Dura est beaucoup plus complexe. Le premier à avoir contextualisé la séquence de cette fusillade en l’accompagnant des prises de vues de divers rushes tournés, ce jour-là, au carrefour de Netzarim, est le cinéaste Pierre Rehov, mais ses enregistrements – qui ont été largement pillés depuis - ne sont pas accessibles sur Internet (8). Par contre, le professeur américain, Richard Landes, met à la disposition des internautes une compilation de nombreux rushes (9) illustrant, de manière saisissante, le procédé de mise en scène, largement dénoncé et expliqué, longtemps auparavant, par Rehov.

Ma position, en la matière, est que la séquence des Al-Dura pris sous les tirs croisés a d'abord été filmée à des fins de propagande, mais qu'au cours de la prise des vues rapprochées (dont quelques images ont fait le tour du monde), des Palestiniens ont réellement ouvert le feu sur l'enfant et son père. Pour s'en persuader, il n'est que de voir le regard incrédule et affolé du père en direction de la caméra - et non en direction du fortin de Tsahal au carrefour de Netzarim. Il témoigne de sa stupéfaction et de sa terreur lorsqu’il voit les tireurs, qui d'après la direction de son regard, se trouvent à l’arrière du cinéaste palestinien.



Donc, pour faire bref et couper court à toute reprise éventuelle de polémique, je précise que j’adhère volontiers à la thèse des prises de vues mettant en scène, ce jour-là, plusieurs "saynètes" du genre de celle qui a tourné à la tragédie.

Ce que, par contre, je persiste à récuser, jusqu’à plus ample informé, c’est la thèse de l’opération médiatique voulue, voire téléguidée par France 2, avec la complicité du caméraman palestinien, Talal Abou Rahma, et celle du journaliste Charles Enderlin, dans le but de nuire à Israël. J’ai dit, et je répète que c’est là une accusation gravissime qu’aucune preuve indiscutable n’étaie.

Ce que je crois, par contre, c’est que des Palestiniens armés, descendus de leur position toute proche -, appelée "Pita" par les Israéliens (10) -, et qui faisait face au lieu de la fusillade, ont profité de la prise de vues qu’effectuait Talal Abou Rahma (peut-être à des fins de mise en scène ou de propagande) de l’enfant et de son père retranchés derrière un fût de béton, pour tirer sur eux à balles réelles. Le tressautement violent de la caméra et le son tout proche des rafales, capté par la bande-son de la caméra, témoignent de ce que le cameraman palestinien lui-même a été surpris. Il est probable qu’il s’est tu ensuite par peur de représailles. Quant au journaliste français Enderlin et à la direction de la chaîne de télévision France 2, il est évident qu’à l’époque des faits, ils ont cru à la version de Talal Abou Rahma - récusée ensuite par l’intéressé lui-même (11) -, accusant les Israéliens d’être à l’origine des tirs meurtriers.

On sait la suite.

Ce que l’on peut reprocher à Enderlin et à France 2, c’est de ne jamais avoir accepté de réviser leurs positions, même après que se soient accumulées des preuves de plus en plus accablantes du traquenard dans lequel Enderlin est tombé.

Je crois utile de reprendre ici ce que j’écrivais ailleurs (12) :
« Peut-être… Jamal Al-Dura a-t-il vu les agresseurs qui ont assassiné son fils et tenté de lui faire subir le même sort. Que nul ne s’étonne qu’il n’ait pas dévoilé cela et qu’il ait même fait de la surenchère depuis qu’il a échappé à la mort de la main de ses concitoyens, en accusant les Israéliens, contre toute vraisemblance. Que peut-il faire d’autre ? Il est bien placé pour savoir comment l’Autorité Palestinienne traite les ’collaborateurs’… Reste l’hypothèse du complot, que certains tentent d’accréditer... On me permettra d’émettre ma propre hypothèse. Il est peu probable qu’il y ait eu machination, et encore moins collusion entre les Palestiniens qui ont tiré sur les Al-Dura, le caméraman palestinien, Talal abu-Rahma, et le journaliste Charles Enderlin. Voilà ce qui a pu se passer. Des Palestiniens en armes, qui n’avaient pas manqué de repérer le père et son enfant, pris sous les tirs croisés et qui s’abritaient le long d’un mur derrière un fût de ciment, ont décidé de profiter de la situation. Ils ont quitté leur position (située - rappelons-le – face au lieu du drame), pour se poster carrément en face de leurs victimes, un peu en arrière du caméraman palestinien, et vider un ou plusieurs chargeurs de leurs armes automatiques en direction de ces malheureux. Deux personnes savent, semble-t-il, que ce crime a été commis par des hommes armés palestiniens : le père du petit Al-Dura… et le caméraman de Ch. Enderlin... Il est probable que ni l’un ni l’autre n’ont vu distinctement les meurtriers (surtout pas le caméraman, qui leur tournait le dos), mais il me semble douteux qu’ils ignorent que ce coup de main meurtrier ait été le fait de Palestiniens. J’ai dit plus haut pourquoi ils persisteront à accréditer la version qui accuse les soldats israéliens. Prétendre qu’il y a eu machination est hasardeux, téméraire, et, de toute manière, impossible à prouver...
Même si l’on peut comprendre que les responsables de France 2 aient gardé un souvenir amer – sans doute assorti de rancune - d’une certaine remise du «Prix de la désinformation» à la chaîne (13), ce fut une erreur, de la part de ses responsables, de faire preuve d’indifférence et d’insensibilité envers la blessure profondément douloureuse et le sentiment aigu d’injustice qu’a causés aux Juifs soucieux de l’honneur de l’Etat d’Israël et de Tsahal, son armée, la diffusion mondiale du clip télévisé montrant la mort en direct d’un enfant palestinien, en l’imputant, sans autre, à des soldats israéliens.»
Enfin, il convient de souligner qu’un élément – fatal aux thèses accusatrices – est systématiquement éludé, ou justifié de manière peu convaincante par les tenants des thèses accusatrices de Charles Enderlin et de France 2 : il s'agit du silence des autorités israéliennes à propos de cette affaire. Rappelons que c’est tout de même Tsahal qui – sans doute sur l’ordre du niveau politique le plus élevé - a procédé à la destruction totale du mur et de toute trace de l’événement in situ. Personnellement, je n’ai jamais été convaincu par les arguments de certaines autorités militaires israéliennes, selon lesquelles l’opération de destruction avait été guidée par des raisons sécuritaires. En tout état de cause, la presse anglo-saxonne n’y a pas cru non plus (14).

La meilleure mise au point concernant la discrétion d’Israël en cette matière me paraît être celle du journaliste belge D. Zomersztajn (15) :
« Jusqu’à présent, personne en Israël, ni le gouvernement, ni l’armée, ni aucune association de combattants ou de vétérans, n’a utilisé les conclusions de l’enquête de Shahaf pour intenter quoi que ce soit contre France 2…
Lors de la séance du 8 novembre 2000 de la commission des affaires étrangères et de la défense de la Knesset, un député a fait remarquer au chef d’état-major, Shaul Mofaz (ministre de la Défense aujourd’hui) qu’on a l’impression qu’au lieu de chercher à comprendre ce qui s’est réellement passé, Tsahal a choisi de mettre en scène une reconstitution fictive et de dissimuler l’incident au moyen d’une enquête dont les conclusions sont préétablies et dont le seul but est de dégager la responsabilité de Tsahal pour la mort de Dura. Shaul Mofaz lui a notamment répondu que l’enquête de Nahum Shahaf est une initiative personnelle du général Samia.
Ces propos ont été confirmés, l’année suivante, dans un rapport présenté devant le sous-comité des opérations internationales et des droits de l’Homme de la Chambre des représentants des Etats-Unis, dans lequel il est précisé que cette soi-disant enquête n’a aucune crédibilité. »
J’ai déjà exprimé ma conviction personnelle, à propos du silence des responsables politiques et militaires israéliens. Convaincus d’avoir été victimes d’un traquenard, et confrontés au déclenchement d’une énorme campagne d’intoxication médiatique cynique, orchestrée par Yasser Arafat, autour de la mort filmée de l’enfant palestinien, dans le but d’incriminer Israël aux yeux du monde, ils ont choisi le silence. Et ce pour plusieurs raisons, d’ordre à la fois stratégique et diplomatique.

Sous la direction d’Ehoud Barak, alors Premier Ministre, le gouvernement israélien, qui espérait mettre fin au conflit palestino-israélien, avait fait des concessions inattendues et surprenantes à Yasser Arafat, à Camp David, en juillet 2000. En témoigne une brève du 18 novembre 2000 (16) – soit un mois et demi après le déclenchement de l’affaire Al-Dura -, qui fait état d’un "recul israélien", qu’elle explicite en ces termes :
« Coincé entre une droite qui demande un renforcement de la répression et la communauté internationale qui fait pression pour un retour à la table des négociations, Ehoud Barak semble maintenant admettre "une petite présence d'observateurs internationaux" pour reprendre l'expression d'Alexandra Schwartzbrod dans Libération. Pour le Premier ministre, le but est de "tendre la perche à Arafat pour permettre à ce dernier de revenir à la table des négociations la tête haute". En effet, si selon un sondage réalisé pour le Maariv, 47 % des Israéliens voteraient pour Benyamin Netanyahou en cas d'élections anticipées, ils sont aussi 56 % à souhaiter un accord de paix définitif avec les Palestiniens. (Libération 18 novembre). »
Lancer une campagne médiatique de grande ampleur pour dénoncer la machination eût été suicidaire de la part du gouvernement israélien. Avec le recul du temps, on ne peut que reconnaître la sagesse de cette attitude prudente. Tenter de désamorcer cette bombe médiatique eût été le meilleur moyen de la faire exploser avec encore plus de violence et de dégâts consécutifs.

Il faudra attendre fin avril 2003 pour que le général Samia (qui ne risquait plus rien à s’exprimer de manière critique à ce propos) confie au journaliste Amnon Lord ses regrets de la manière maladroite dont avait été traitée ce qui était devenu, entre temps, l’affaire Al-Dura. Lord écrit (17):
« Samia raconte qu’en fait, le chef du gouvernement et ministre de la défense d’alors, Ehoud Barak, en accord avec le général Giora Eigland et également, selon certains, avec le chef d’Etat-major adjoint de l’époque, Bougi Yaalon, se sont lourdement trompés en admettant la responsabilité d’Israël dans l’assassinat de Al-Dura. Ils ont pensé que c’était le moyen le plus rapide et efficace d’évacuer cette affaire de l’ordre du jour. »

A la lumière de la rétrospective ci-dessus, et à celle des propos du général Samia, on comprendra peut-être pourquoi, avec quelques autres (qui, pour des raisons qui leur appartiennent, n’expriment pas publiquement leur dissentiment à l’égard des campagnes d’accusations de France 2 et de Charles Enderlin), j’estime contreproductive, voire nuisible à la cause juive, en général, et à celle d’Israël, en particulier, la poursuite de ces actions, si sincères que soient celles et ceux qui s’en font les champions, en raison de leurs convictions, privilégiées par eux à un travail serein et exigeant d’investigation, qui serait le seul moyen efficace et acceptable d’étayer ou d’infirmer ces graves accusations.

Menahem Macina

© www.upjf.org

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