Monday, July 02, 2007

à la mémoire de librescu mort en virginie

Samarkand, le Grand Vizir et l’indécence anti-israélienne et antisémite
28 juin 2007 - Charles Etienne Nephtali

Apprenant que je me trouvais aux Etats-Unis, un ancien collègue demeurant au Canada, « gauchiste jusqu’au bout des ongles et fier de l’être » comme il se plaît à se définir lui-même, me téléphona pour me faire savoir que, lors d’un voyage aux Etats-Unis, il avait séjourné en Virginie et était passé voir mon fils dans sa nouvelle maison à Boston (Massachusetts). Au cours de l’entretien, à ma grande surprise, il me demanda à brûle-pourpoint : « Au fait, connais-tu l’histoire du Grand Vizir ? »


Ayant répondu par la négative, il enchaîna:

- Un Grand Vizir ayant appris la date de sa mort, quitta son palais pour aller le plus loin possible. Il se rendit à Samarkand, tout à fait à l’opposé du pays. Arrivé à Samarkand, la Dame à la faux, la Mort, l'accueillit avec ces « aimables » paroles de bienvenue : « Qu'est-ce qui t'a retenu si longtemps? Que faisais-tu si loin ? Je t'attendais ici et tu sais parfaitement que mes rendez-vous sont toujours très ponctuels »

- Mais pourquoi me racontes-tu cette histoire ? Quel rapport avec ton voyage américain ?

- Parce que c’est ce qui est arrivé en Virginie à un professeur juif qui avait échappé aux camps de la mort et qui, ayant peur de vivre en Israël, préféra vivre aux Etats-Unis. C’est là qu’il a été tué. Comme quoi, on n’échappe jamais à son destin ! »

Comparaison n’est jamais raison et, dans le cas présent, estimant que la comparaison de mon interlocuteur était loin d’être raisonnable mais frisait plutôt l’indécence, et était même l’indécence absolue, j’ai préféré raccrocher sans mot dire.

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Indécence absolue car la dramatique histoire du Professeur Liviu Librescu (Z’’L) est naturellement tout autre.

Rappelez-vous : 33 morts, 32 étudiants et ce professeur de l’Université Polytechnique Virginia Tech, près de Blacksburg, presque 8 ans après le massacre de Columbine. Tel fut le bilan de l’hallucinante tuerie perpétrée par cet étudiant sud-coréen de 23 ans qui avait bien prémédité et organisé son acte le 16 avril dernier. Bilan effrayant qui aurait presque pu être multiplié par deux sans la présence d’esprit, le courage et le sacrifice de ce professeur israélien de 76 ans, Liviu Librescu (Z’’L), un savant remarquable et particulièrement brillant, un homme droit, généreux et honnête s’il en fut.

Rappelez-vous : alors qu’il donnait un cours de génie mécanique au 2ème étage d’un bâtiment de l’Université, la fusillade éclata et le tueur fou tenta d’entrer dans la classe. Le professeur Liviu Librescu n’hésita pas à se sacrifier en bloquant la porte, geste héroïque qui permit à ses élèves de s’enfuir par les fenêtres, échappant ainsi au carnage. Geste héroïque qui lui coûta la vie

Je fus d’autant plus surpris de la façon dont mon ancien collègue me relata ce drame ( « Juif, ayant peur de vivre en Israël » ) qu’aux Etats-Unis, les médias furent unanimes à rendre hommage à cet homme exceptionnel, brave et courageux.

Né en Roumanie, Liviu Librescu fut, très jeune, confronté à la barbarie allemande et à la collaboration de son pays (comme en France). Déporté au camp de concentration et d’extermination de Tranistria en Moldavie orientale, un camp sans eau courante, sans électricité et sans latrines, il échappa à la mort alors que près de 200.000 personnes, en grande majorité Juives, mais également Tziganes, n’eurent pas cette chance.

Transféré au Ghetto de Foscani, il survécut à toute une série de misères, drames et brimades. Plus tard, il se maria à une Juive roumaine, elle-même rescapée de la Shoah. Pour mémoire et pour la Mémoire, la Communauté juive de Roumanie fut décimée, 350.000 de ses membres furent assassinés durant la Shoah.

Diplômé de l’Université Polytechnique de Budapest en 1953, dont il fut fait docteur honoris causa en 2000, Liviu Librescu fit une carrière particulièrement brillante à l’Agence Aérospatiale Roumaine. Confronté à une situation qui se dégradait au début des années 70 sous la dictature du tyran des Carpathes, Ceausescu le Conducator, il envisagea de faire son Alyah. Il fut immédiatement licencié et à partir de ce moment-là, les ennuis s’accumulèrent.

Il est dit que c’est grâce à l’intervention personnelle de M. Begin (1) que Liviu Librescu, sa femme et ses deux enfants purent enfin émigrer en Israël. Spécialiste de la dynamique des pales de rotors, technique, dit-on, peu développée en Israël, il fut contacté par la NASA, s’installa donc aux Etats-Unis et y travailla jusqu’à sa retraite.

C’est à cette époque, en 1984, qu’au vu de sa renommée mondiale et des ses multiples publications, l’Université Polytechnique Virginia Tech lui proposa un poste d’enseignant. Et c’est dans cette Université que Liviu Librescu trouva la mort, victime de son courage, de sa bravoure et de son héroïsme, le jour même du Souvenir de la Shoah et de l’Héroïsme, Yom HaShoah ve la Gvoura.

Rien à voir donc avec l’indécente et idiote comparaison de mon ancien collègue pétrit de gauchisme et de sentiments anti-israéliens, voire antisémites.

« Qui sauve une vie sauve l’Humanité » dit le Talmud. Ce jour-là, Liviu Librescu (Z’’L) sauva des dizaines de vies de l’inhumanité, de la barbarie et de la sauvagerie aveugles. Son Nom vient s’ajouter à la longue liste des Héros d’Israël.

Il repose maintenant en Israël pour l’éternité.

Prions pour le repos de son âme.

Qu’il prie pour Israël et pour notre Peuple. AMEN !




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(1) Il est dommage que Jonathan Pollard, condamné à perpétuité en 1987, n’ait pas eu la chance que les différents Premiers Ministres ou/et Présidents d’Israël qui se succédèrent soient « intervenus personnellement » pour le faire libérer. Et ce n’est pas les étonnants propos de Richard Jones, Ambassadeur des Etats-Unis en Israël, qui pourront nous rassurer. En effet, fin mai, à l’Université de Bar-Ilan, ce diplomate déclara que le cas de Jonathan Pollard était « très sensible » et que le condamné « devait s’estimer heureux de n’avoir pas été exécuté », comme (rajouté par moi) les époux Rosenberg, unique cas d’une exécution pour trahison depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale.

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