Monday, December 15, 2008

Bernard Madoff : le faux philanthrope de Wall Street
[ 15/12/08 ] 6 commentaires

Ancien courtier respecté et connu pour ses activités philanthropiques, l'ex-patron du Nasdaq (de 1990 à 1991) a trompé son monde pendant des années.
DE NOTRE BUREAU DE NEW YORK.
« Unbelievable [Incroyable] ! » Ses nombreux amis de la finance et des clubs huppés new-yorkais n'en reviennent pas. Que l'ancien courtier au grand coeur surnommé « Bernie », l'homme qui était devenu l'un des premiers intervenants sur le Nasdaq, connu et respecté pour ses activités philanthropiques, ait pu berner ses clients-amis pendant des années relève de l'inconcevable. Certes, le taux de rendement constant de 12 %-13 % garanti à ses clients avait fait froncer quelques sourcils et la SEC avait même ouvert, en 1992, une enquête (classée sans suite) sur ses activités. Mais jamais ses camarades de golf, des Hamptons ou de Palm Beach n'auraient pu imaginer une telle dégringolade.

« Il était considéré comme un grand philanthrope, un pilier de la communauté financière new-yorkaise », résume un gérant de fonds spéculatif. Malgré son appartement de plus de 5 millions de dollars à Manhattan, sa villa sur Long Island, son yacht au Bahamas, il était aussi très actif dans les oeuvres caritatives des cercles juifs new-yorkais à travers sa Madoff Family Foundation.

« Teneurs de marché »
Après avoir abandonné ses études de droit, Bernie Madoff a créé sa firme de courtage Madoff Securities dans les années 1950. Il y travaille en famille, avec son frère, Peter, ses deux fils, Mark et Andrew, qui déclarent ignorer tout de ses manipulations illicites, et autres nièces et neveux. Sa principale intuition a été de comprendre l'importance des plates-formes informatiques dans les maisons de courtage. Au début des années 1970, il a contribué largement au démarrage du Nasdaq en y devenant progressivement l'un des trois premiers « teneurs de marché », puis président du Nasdaq en 1990 et 1991. En octobre, Madoff Securities était encore le 23e teneur de marché sur le Nasdaq. Parallèlement, il a développé une activité de gestion de fortune pour riches entrepreneurs privés qu'il rémunérait avec de « l'argent inexistant », selon ses propres aveux. Son succès était tel qu'il était surnommé le « Bon du Trésor juif » par ses investisseurs.

Une seule chose intriguait parfois ses amis : pourquoi diable refusait-il l'argent de tant d'investisseurs qui le « suppliaient » de devenir ses clients ? Sans doute sa vraie philanthropie secrète.

Le « scandale Madoff » secoue la communauté financière new-yorkaise
[ 15/12/08 ] 8 commentaires

Bernard Madoff, ponte de la finance américaine, a été arrêté jeudi dernier, après le dépôt simultané de plaintes du FBI et de la Securities and Exchange Commission. La fraude dont il est accusé aurait coûté 50 milliards de dollars à ses clients. La moitié des investisseurs étaient des fonds spéculatifs, le reste de la clientèle étant constitué de banques et de fortunes privées.
Il ne manquait plus qu'un scandale financier géant pour miner la confiance des investisseurs de Wall Street. Au lendemain de l'arrestation de Bernard Madoff par le FBI, un groupe d'investisseurs en colère s'est réuni vendredi, au pied du Lipstick Building, à l'angle de la 54e Rue, qui abrite le siège de Bernard L. Madoff Investment Securities (BMIS) à Manhattan. « Je n'ai absolument plus rien. Ce n'est qu'un énorme mensonge », a confié lui-même aux enquêteurs l'ancien patron du Nasdaq, Bernard Madoff, soixante-dix ans, selon le texte de la plainte déposée par la Securities and Exchange Commission (SEC), en marge de la plainte pénale. De l'aveu même du fondateur du fonds, dénoncé par ses propres fils - sans doute pour se couvrir -, le montant des pertes de BMIS s'élèverait à 50 milliards de dollars, bien plus que ses 17,1 milliards de dollars d'actifs sous gestion. Mais, selon certains experts, le montant global de la fraude se situerait plutôt dans une fourchette de 20 à 25 milliards de dollars.

« Si cela se confirme, l'affaire Madoff pourrait être un scandale plus important qu'Enron, Tyco ou Boesky, et beaucoup plus gros que Bayou, estime Doug Kass, le gérant de fonds spéculatif Seabreeze Partners. Elle s'attaque au coeur de la confiance des investisseurs qui s'est déjà effondrée et qui reste très fragile. » A la veille de son arrestation, le fondateur de BMIS avait déjà avoué à ses deux fils, qui travaillent dans une branche de la société, que son entreprise était fondée sur une gigantesque escroquerie basée sur le fameux « schéma de Ponzi ». En substance, les investisseurs de départ étaient rémunérés avec l'argent des investisseurs les plus récents, la quasi-totalité des actifs de la firme étant fictifs.

Colère des investisseurs
C'est tout le spectre de la finance qui est touché : fonds d'investissement, fonds de « hedge funds », banques, collectivités locales et particuliers. Le fonds alternatif Bramdean de Nicola Horlick (l'ancienne gérante vedette de la Société Générale à Londres), Union Bancaire Privée (UBP), Optimal Investment Services (filiale de Santander) et Pioneer Alternative Investments (filiale de l'italien UniCredit) font partie des premières victimes déclarées. Les fonds de fonds Fairfield Greenwich, Tremont Capital et Maxam Capital seraient exposés à hauteur de plusieurs centaines de millions de dollars. A titre personnel, le président de GMAC Financial Services, l'activité d'investissements de General Motors, est également touché. D'après le « Wall Street Journal », BNP Paribas et Nomura sont également touchés. Exposée via ses activités de marchés, BNP Paribas, qui a prêté à des fonds ayant investi dans Madoff, pourrait au maximum perdre jusqu'à 350 millions d'euros.

Plus de la moitié des investisseurs de BMIS étaient des fonds spéculatifs, le reste de la clientèle étant constitué de banques et de fortunes privées, parmi lesquelles figuraient des amis ou des voisins. « La plupart des investisseurs étaient des capitaines d'industrie, entreprises, fonds de fonds, universités ou fondations qui utilisaient Madoff comme une source de gestion de liquidités à haut rendement », expliquait ce week-end un gérant de fonds alternatif. Les deux principaux perdants jusqu'à présent répertoriés seraient Walter Noel, le fondateur de Fairfield Greenwich Group, dont une branche, Fairfield Sentry, forte de 7,3 milliards de dollars d'actifs, a investi avec BMIS, et une branche de Kingate Management, Kingate Global Fund, forte de 2,8 milliards de dollars d'actifs sous gestion. A elles seules, les institutions financières suisses devraient supporter des pertes d'au moins 5 milliards de dollars, d'après « Le Temps ».

Parmi les autres clients identifiés de Bernard Madoff, on compte aussi les fonds Rye Select et Sterling Equities qui gèrent l'équipe de base-ball des Mets de New York. La colère des investisseurs est d'autant plus grande que déjà, en 2001, le fonctionnement de Madoff, qui garantissait des rendements constants à ses clients et a enregistré seulement cinq mois de rendements négatifs sur une durée de 156 mois, avaient suscité certains doutes dans la presse américaine. Un article de « Barron's » de 2001 avait déjà mis en cause sa transparence en s'étonnant du « manque de volatilité » de ses résultats. L'affaire Madoff risque de renforcer les critiques sur la capacité de supervision de la SEC.

PIERRE DE GASQUET (À NEW YORK), AVEC M. RN. (À PARIS)
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